Critique | Cinéma

Beau Is Afraid: nanar boursouflé

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© Takashi Seida
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Titre - Beau Is Afraid

Réalisateur-trice - d'Ari Aster

Casting - Avec Joaquin Phoenix, Patti LuPone, Amy Ryan.

Durée - 2h59

Nicolas Clément
Nicolas Clément Journaliste cinéma

Ari Aster plonge en apnée dans la psyché malade d’un loser patenté et accouche d’un nanar boursouflé en quête forcée d’étrangeté.

Habile faiseur d’horreur sous influence, Ari Aster était retourné voir du côté de Rosemary’s Baby et The Exorcist au moment de réaliser le très atmosphérique Hereditary, objet d’une hype largement excessive en 2018. L’année suivante, il s’était d’évidence souvenu du cultissime The Wicker Man au moment de signer Midsommar, semi-réussite évoluant entre sympathique comédie grinçante et malaise un peu trop balisé. Il a cette fois carrément partagé une liste de treize films à voir avant de découvrir Beau Is Afraid dans les salles. Celle-ci navigue des Oiseaux d’Hitchcock au Playtime de Jacques Tati en passant par Johnny Guitare de Nicholas Ray, Une question de vie ou de mort du tandem Powell et Pressburger, Rendez-vous au paradis d’Albert Brooks ou encore une paire d’ovnis du surréaliste canadien Guy Maddin.

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Il s’autoréférence également beaucoup, au risque d’ailleurs (déjà…) de caricaturer son propre cinéma, dans Beau Is Afraid, puisant notamment dans ses courts métrages Beau (2011) et Munchausen (2013) la matière première de cette aventure résolument picaresque doublée d’un cauchemar halluciné singulièrement chargé. Pensé avant tout comme une comédie, ce nouveau long métrage cueille quoi qu’il en soit Beau Wasserman (Joaquin Phoenix, fidèle à lui-même), cœur tendre paranoïaque, au moment du décès inopiné de sa mère. Laissé seul face à ses angoisses, celui-ci se lance alors dans un périple introspectif aux accents épiques afin de pouvoir être présent à son enterrement. Mais l’univers entier semble se liguer contre lui…

On pense inévitablement au cinéma de Woody Allen, et bien plus encore à celui de Charlie Kaufman, face à cette odyssée kafkaïenne et freudienne hyper théâtralisée plongeant en apnée dans la psyché malade d’un loser patenté. Certes, tout est fou et dégénéré dans Beau Is Afraid, mais il s’agit toujours hélas d’une folie très consciente d’elle-même, d’une démesure très mesurée, d’une déraison très raisonnable, d’un inconfort très confortable. Chantre de ce qu’on appelle (allez comprendre pourquoi…) l’elevated horror, Ari Aster, en effet, s’y dévoile en cinéaste premier de la classe d’une école beau bizarre qu’il embrasse avec beaucoup moins de sincérité que de calcul intéressé.

Film de petit malin très fier de ses effets, Beau Is Afraid clôture ainsi une sorte de trilogie sur la famille en mode laborieusement œdipien, pataugeant dans un semblant de labyrinthe mental où la psychanalyse de bazar le dispute au symbolisme lourdingue. Jamais drôle ni même perturbant, l’objet se traîne interminablement, Aster semblant vouloir étirer chacun de ses plans jusqu’au bout du bout de l’ennui. Un ratage à peu près total.

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