Critique

Beasts of the Southern Wild

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Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

DRAME | Caméra d’or au festival de Cannes, ce film fascinant nous entraîne en Louisiane sinistrée par l’ouragan Katrina, à la rencontre de survivants indéracinables.

DRAME DE BENH ZEITLIN. AVEC QUVENZHANÉ WALLIS, DWIGHT HENRY, JONSHEL ALEXANDER. 1H32. SORTIE: 12/12. ***

Il y avait déjà la misère. S’y ajouta Katrina. Un joli prénom féminin pour un phénomène naturel des plus dévastateurs. L’ouragan promet d’infliger ses ravages à La Nouvelle-Orléans, mais aussi dans toute la région et donc dans le bayou, zone entre terre et eau où s’accrochent les créatures désignées par le titre du film de Benh Zeitlin (lire son interview dans le Focus du 7 décembre).

Ces bêtes on ne peut plus humaines survivent dans des conditions que presque tous jugeront dégradantes, dans une pauvreté confinant au plus total dénuement. Mais dans cette communauté, nul ne songerait à partir. Les vagues destructrices soulevées par Katrina ne leur font pas peur. Et ce n’est pas le gouvernement, malgré tous les efforts de ses fonctionnaires chargés de faire évacuer les habitants, qui réussira là où la nature n’a rien obtenu… Réalisé avec un tout petit budget, par un réalisateur de 29 ans alliant talent, audace et générosité, Beasts of the Southern Wild filme à hauteur d’homme ces irréductibles entre tous les irréductibles. Scénarisée comme une fiction, chevillée au réel comme un documentaire, c’est la proposition cinématographique la plus singulière venue des Etats-Unis depuis belle lurette. Et une oeuvre saisissante, passionnante, profondément émouvante sans recours aux ficelles sentimentales ni paternalisme aucun.

Réalisme magique

On appelle le « bathtub », la baignoire, ce coin de Louisiane profonde où habitent Hushpuppy et les siens. Hushpuppy a 6 ans. Wink, son père, a le sang chaud, une fameuse descente, et une maladie qui aura tôt ou tard raison de lui. La gamine n’en conserve pas moins une attitude optimiste. Loin d’écouter les appels à l’évacuation, elle aide papa à barricader ce qui leur tient lieu de maison. Le passage de l’ouragan va placer Hushpuppy et les autres survivants dans une précarité encore plus prononcée. Mais ils s’accrocheront, dans des conditions de plus en plus improbables. Avec chez les enfants ces images, transmises par leur institutrice, d’aurochs monstrueux que la fonte des glaces pourrait libérer et faire déferler…

Entre réalisme extrême et dimension mythique, âpreté organique et poésie sauvage, Benh Zeitlin signe un film à nul autre comparable. Une sorte d’ovni qui serait venu non pas de l’espace mais de l’humain dans ce qu’il a de plus fondamental et basique. Une expérience extraordinaire pour le spectateur, invité à découvrir une culture aussi différente en apparence que proche, au fond. Avec aussi la révélation d’une toute jeune interprète, Quvenzhané Wallis, choisie entre 3500 postulantes pour le rôle de Hushpuppy, l’héroïne et la narratrice du ô combien mémorable Beasts of the Southern Wild.

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