de Guillaume Singelin, éditions Rue de Sèvres
Frontier
202 pages
La bonne science-fiction pourrait être celle qui a la capacité de projeter notre société dans un futur réaliste tout en pointant les dérives du fonctionnement de celle-ci. Frontier de Guillaume Singelin est de cette veine-là. Biberonné aux mangas et à une certaine culture américaine, l’auteur français imagine trois personnages subissant les violences du monde qui les entoure. Une scientifique qui se fait voler son projet d’exploration spatiale par une grosse boîte qui le détourne pour son propre profit. Un mineur qui n’a jamais connu que la vie en apesanteur artificielle des stations stellaires et les sorties dans l’espace pour aller casser de l’astéroïde. Et enfin, une mercenaire qui loue ses services à des compagnies minières pour aller intimider, bousculer ou plus si affinité, la concurrence. Chacun d’eux a une part d’ombre et des certitudes mal placées et chacun d’eux recherche une forme de rédemption.
Sans spoiler le dénouement -il suffit de regarder la couverture-, ils vont devoir s’entraider pour y parvenir, la question étant plutôt quand et comment. La violence, marque de fabrique de l’auteur, est ici diluée dans l’ampleur du récit et ne concerne finalement qu’un seul personnage, même si la scientifique et le mineur en subissent chacun une forme insidieuse par leur condition d’objet consommable aux yeux de leur employeur. Si la trame semble cousue de fil blanc, l’intérêt porte moins sur l’intrigue que sur le moyen de la raconter. L’auteur fait une description hyper réaliste du monde dans lequel évoluent ses protagonistes, aux formes réduites à leur plus simple représentation, sorte de personnages Lego en version molle. Le découpage très nerveux et le fourmillement de détails apportent une dynamique particulièrement punchy et achèvent de nous transporter dans ce “road movie” interstellaire.
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