Titre - Ping Pong
Genre - Photographie
Réalisateur-trice - Vincen Beeckman
Sortie - Jusqu'au 08/10 au Fomu, ANvers
Au Fomu avec Ping Pong, Vincen Beeckman redore le blason de la photographie. À ne manquer sous aucun prétexte!
C’est un être humain comme on n’en connaît pas beaucoup. Ses amis l’ont surnommé “le canard”, un totem qui en dit long sur son imperméabilité à la poisse et aux autres pessimismes. Il ne faudrait pas croire pour autant que Vincen Beeckman (50 ans) vit dans sa bulle. Loin de là. C’est moins une carapace qu’il s’est construite qu’un certain regard, certes détaché, qu’il jette sur le monde. En résulte une pratique qui n’a pas son pareil pour questionner la nature prédatrice de la photographie. Dans La Goutte d’or, le roman de Michel Tournier, le jeune Idriss part à la recherche d’un cliché qu’une jeune femme blonde a pris de lui. “C’est un peu de toi qui est parti”, lui assure sa mère. Cette dimension d’objectivation, de pétrification du vivant, Beeckman l’a immédiatement perçue. Il n’en veut pas, lui qui travaille sur le long terme, qui accompagne ses sujets à la façon d’un soignant. L’autre dimension à l’œuvre chez le Bruxellois consiste en la complexification du monde qu’il nous donne à voir. Il n’a pas son pareil pour nous faire réexaminer d’autres vies que la nôtre. À ce titre, l’exposition du Fomu, qui se déploie sur un vaste plateau articulé en trois sections, est exemplaire. Elle s’ouvre sur les images de “marginaux” dont on aurait vite fait de penser qu’ils sont des laissés-pour-compte de la société. Vincen Beeckman nous recadre. Devant nous, c’est bien de Cracks dont il s’agit, de super-héros dont nous avons tout à apprendre.
Voie du milieu
Et Carlos, cet ancien acteur ayant fait une apparition dans C’est arrivé près de chez vous, qui est-il? Un alcoolique à la dérive? Non, ces yeux rouges injectés cachent un prophète que l’objectif Beeckman suit jusque dans son appartement bruxellois. Il en va de même pour Les Intimes. Une famille défavorisée du Borinage? Plutôt une cellule joyeuse et nomade dont le déterminisme n’aura pas la peau. Il y a aussi la série La Devinière, du nom de ce lieu d’accueil en périphérie de Charleroi où résident de manière permanente des personnes souffrant d’affections psychiques. Cette communauté est sans aucun doute celle qui fait le mieux écho à la démarche visuelle du photographe. Là-bas, on déchire comme on recolle, on accole comme on décolle. Ces forces, l’intéressé les canalise. Lui qui nous expliquait: “J’aime tracer une voie du milieu. Quand je suis confronté à un sujet banal, j’essaie de le rendre exceptionnel. En revanche, face à quelque chose d’extraordinaire, je vais essayer de l’adoucir à travers un récit plus large qui n’est pas centré sur le coup de force visuel.” Dans cet ordre d’idées, celui qui appartient au collectif Les Morts de la rue, un groupe de personnes s’engageant à retrouver les proches de personnes décédées dans la solitude du tissu urbain bruxellois, aborde la thématique de la Faucheuse avec une délicatesse infinie. Difficile de retenir ses larmes devant les 21 images narrant Claude & Lilly, une histoire d’amour photographiée pendant 15 ans et s’achevant avec la disparition de Lilly.
Lire aussi | Le Pop Art, aussi une aventure belge
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici