Amal: Lubna Azabal convaincante en enseignante face à la radicalisation

Avec Amal, Jawad Rhalib passe à la fiction pour raconter la monter de l’intégrisme religieux dans les classes. Un film à thèse porté par Lubna Azabal.

“Lisez, posez-vous des questions, développez votre esprit critique, vous serez libres.” Amal, professeure de littérature dans une école bruxelloise est confrontée à la levée de bouclier de certains élèves et parents, mais aussi collègues quand elle décide d’enseigner les textes du poète arabe Aboû Nouwâs. Ces vers satiriques du VIIIe siècle où l’auteur abordait sa propre liberté sexuelle heurtent ces élèves du XXIe siècle. L’enseignante est intimement convaincue que l’école peut être une porte ouverte sur le monde, et pour cela, elle s’oppose aux obscurantismes, à la censure, à la mainmise de la religion sur le champ des arts et de la littérature, et ne saurait tolérer la mise à l’écart de textes quels qu’ils soient pour éviter ce que d’aucuns considèrent comme de la provocation. “Apaiser les esprits”, c’est le credo que martèle avec résignation la proviseure, comme abattue par les tensions communautaires. La laïcité semble avoir fait long feu dans son école, les dissensions s’aggravent au sein du corps enseignant au fur et à mesure qu’Amal revendique sa liberté de penser et d’enseigner.

Le cinéaste observe cette poudrière éducative avec une vraie puissance documentaire. L’assassinat de Samuel Paty est bien sûr dans tous les esprits. Dans le rôle titre, qui semble écrit pour elle, Lubna Azabal est plus que convaincante, elle habite son personnage avec une rare intensité. Face à elle, les jeunes comédiens comme les plus confirmés incarnent avec une grande véracité les trajectoires souvent dures de leurs personnages. Jawad Rhalib ose le film à thèse, posant des actes narratifs qui ne laissent pas de doute sur ce qu’il dénonce, notamment le refus d’engagement par précaution de certains face aux extrémismes, jusque dans les salles de classe.