Youtube fête ses 20 ans (3/7): comment Rebecca Black est passée de risée du Net à star hyperpop

Rebecca Black alors âgée de 13 ans, et ses copines, dans le clip de Friday
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Youtube a 20 ans. Retour sur l’histoire d’une plateforme vidéo plus populaire que jamais, en sept moments clés. Aujourd’hui, retour sur l’un des clips les plus détestés de Youtube : Friday, de Rebecca Black

La vie ne fait pas de cadeau, chantait Jacques Brel. Internet non plus. Quand il tombe sur la vidéo de Rebecca Black, il va se lâcher. Le clip de ­Friday est posté en février 2011. La chanson est une gentille comptine pop à l’américaine. Une production clé en main des studios ARK Music Factory que les parents Black ont offerte à leur fille –musique et clip inclus pour la somme de 4.000 dollars.

Rebecca est alors une ado de 13 ans, habitant avec sa famille dans un quartier de la périphérie de Los Angeles, façon ­Wisteria Lane. Dans la vidéo de Friday, elle chante l’excitation du week-end qui approche. En route vers la party, on la voit perchée sur la banquette arrière d’une décapotable, entourée de deux amies, arborant chacune un appareil dentaire ingrat…

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Les premiers jours, la vidéo reste confinée dans les méandres de YouTube. Il faut attendre un tweet de l’humoriste Michael J. Nelson pour que le nombre de vues s’emballe. Mais pas forcément pour les bonnes raisons. «Le pire clip de l’histoire!», décrète le comédien. A partir de là, Friday va devenir le sujet dont tout le monde cause dans le petit monde de la pop. Surtout pour s’en moquer. Sur ­YouTube, la vidéo cumule les commentaires railleurs et les pouces baissés. D’ici la fin de l’année 2011, elle rentrera, certes, dans le top 20 des vidéos les plus vues de YouTube, mais en battant également le record de dislikes. Un peu comme le fameux Chocolate Rain de Tay ­Zonday, Friday génère autant de curiosité que d’embarras.

Star hyperpop

Pour cause, le clip fauché pique aux yeux. La voix nasillarde est autotunée au point de créer le malaise. Quant aux paroles –«Yesterday was Thursday/Today is Friday/We so excited/We gonna have a ball today/Tomorrow is Saturday/And Sunday comes after wards»-, même pour une chanson teenage pop, elles donnent presque le vertige.

Friday va ainsi devenir le sujet de multiples parodies. Mais aussi d’une certaine fascination. Citée dans Hyperpop, le passionnant essai de Julie Ackermann consacré au genre (Façonnage éditions, 2024), la théoricienne des médias Alexandra Juhasz explique: ­«YouTube n’est qu’ironie, partout, tout le temps. L’ironie (…) a longtemps servi de distanciation moderniste et a parfois permis de formuler de manière productive une critique radicale. Cependant, au fur et à mesure que YouTube a rendu ce style omniprésent, sa fonction a changé et ses contours se sont adoucis.» De fait, puisque l’ironie est partout, récupérée y compris par ceux qu’elle tente de critiquer, elle change de nature. Jusqu’à réinjecter, chez la Gen Z, une forme de sincérité.

Un peu comme les Shaggs –le groupe de rock féminin des années 1960 (également décrit comme «le pire du monde»)– étaient citées comme influence par Kurt Cobain, Rebecca Black deviendra une égérie de l’hyper­pop, cette niche musicale branchée sur le Net qui va bousculer les hit-parades.

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En 2010, l’ancienne risée du Net se retrouve ainsi invitée sur l’album de Dorian Electra, star du genre. Et, pour ses 10 ans, Friday a eu droit à son remix hyperpop, produit par 100gecs. Début de l’année, l’Américaine sortait encore son deuxième album, Salvation, qu’elle est même venue présenter à l’Orangerie du Botanique, à Bruxelles. ­­«I don’t want this weekend to end…»

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