NO(R)WAY OF LIFE – OSLO, AUGUST 31ST ET THE KING OF DEVIL’S ISLAND OFFRENT DEUX VISIONS SUFFOCANTES DU MONDE, ENTRE SPLEEN EXISTENTIEL ET RÉVOLTE CARCÉRALE ADOLESCENTE.

1 DE JOACHIM TRIER. AVEC ANDERS DANIELSEN LIE, HANS OLAV BRENNER, INGRID OLAVA. 1 H 31. DIST: TWIN PICS.

2 DE MARIUS HOLST. AVEC BENJAMIN HELSTAD, KRISTOFFER JONER, STELLAN SKARSGARD. 1 H 51. DIST: TWIN PICS.

Découvert à Cannes en 2011, Oslo, 31 août, le second long métrage du cinéaste norvégien Joachim Trier, restera comme l’un des films majeurs d’un millésime d’exception. Librement adapté du roman Le feu follet de Pierre Drieu La Rochelle (celui-là même qu’avait brillamment transposé Louis Malle, dans un film hanté par Maurice Ronet), le film accompagne, l’espace de quelques heures, les déambulations dans la capitale nordique d’Anders (Anders Danielsen Lie, phénoménal), un individu dans la trentaine à la veille de sortir de cure de désintoxication. Et qui, autorisé à se présenter à un entretien d’embauche, va revoir quelques proches et reconsidérer son existence, en autant de tentatives de (re)trouver un sens à une vie face à laquelle il semble se défiler autant qu’elle se défie de lui.

Inscrit dans un cadre urbain mouvant, s’étirant entre la mémoire des années 70 et le présent d’un été finissant, le film établit une cartographie de la dépression contemporaine ou quelque chose d’approchant. Et déploie, ce faisant, une vision d’une noirceur assumée, cette dérive solitaire libérant un spleen volatil dans une perspective toute nihiliste. Propos mis en scène avec une sécheresse confinant à l’ascèse, pour une £uvre pas moins suffocante pour autant, progression sur le fil du rasoir trouvant les accents d’une paradoxale beauté. C’est dire aussi si Oslo, 31 août supporte allègrement une seconde vision et au-delà, son édition DVD bienvenue étant cependant dénuée de compléments.

Moral en berne

Cinéaste rare -une poignée de films, tout au plus, en une petite vingtaine d’années, Marius Holst s’est, pour sa part, inspiré d’une histoire vraie pour The King of Devil’s Island. L’action se déroule au début du XXe siècle à Bastoy, centre pour jeunes délinquants posé sur une île norvégienne à moins de deux heures d’Oslo. Un cadre désolé pour un horizon désenchanté, direction et gardiens menant l’institution d’une main de fer, usant et abusant pour certains de pensionnaires dont l’identité a été ravalée au rang de matricule. Une réalité blême qui va toutefois être chamboulée par l’arrivée de deux nouveaux détenus, le premier aux allures de souffre-douleur tout désigné, le second bien décidé à ne pas s’en laisser conter.

Classique dans son approche et parfois surligné dans ses intentions, Les révoltés de l’île du diable, suivant son titre français explicite, n’en reste pas moins un drame carcéral puissant. Privilégiant une approche réaliste, Holst signe un film acéré, saturé de violence morale et physique comme d’injustice, mais où porte aussi le vent de la rébellion -adolescente, pour le coup. Ce en quoi l’on pourra voir à loisir l’une des multiples résonances intemporelles d’une £uvre dont l’intensité culmine dans un final proprement étourdissant. l

TEXTE JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS

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