Le contrat avec Sony a leaké: on sait désormais ce que gagnent les majors grâce à Spotify
Le contrat qui lie Spotify à Sony Music a leaké et est particulièrement révélateur. De quoi expliquer comment le n°1 du streaming peut doubler son chiffre d’affaires tout en triplant ses pertes…
Début mai, Spotify dévoilait ses résultats financiers et ceux-ci avaient tout pour surprendre: alors que le n°1 du streaming mondial pèse quelque 8,4 milliards de dollars (7,5 milliards d’euros), celui-ci accusait pourtant des pertes triples par rapport à l’année précédente, s’élevant à 162,3 millions d’euros pour 2014. Comment cela est-il possible? Le contrat entre Spotify et Sony Music, sur lequel The Verge a mis la main récemment, a été signé en 2011 lorsque l’entreprise suédoise s’est implantée aux États-Unis, et permet d’y voir plus clair. Et révèle bien plus encore -comme la manière dont les artistes sont payés grâce au streaming.
Dans ce contrat de 42 pages, désormais dépassé puisque couvrant une période de deux ans (avec option pour une troisième année), on découvre notamment les lourdes avances que Spotify s’est engagé à verser à la major: 9 millions pour la première année, 16 pour la seconde, et 17,5 pour la troisième. Mais le contrat ne précise nulle part ce que Sony pourra faire avec cet argent: ira-t-il aux artistes ou non, la question est sans réponse.
Émerge aussi notamment une clause dite « de la nation la plus favorisée », qui permet à Sony de s’assurer de toujours avoir la meilleure part du gâteau. En effet, si un autre label ou major du disque parvenait à obtenir de meilleures conditions, Sony verrait sa part de revenus augmenter proportionnellement, de manière automatique. Dans le graphique ci-dessous, The Verge illustre parfaitement cette clause « NPF ». « Si un label reçoit 1 million de $ pour chaque pourcentage de la part de marché qu’il possède, et que Sony ne reçoit que 600.000$ pour le même pourcentage, Spotify devra automatiquement payer la différence de 400.000$ à Sony Music. »
Si le contrat stipule que Spotify a le droit de garder systématiquement 15% de certains revenus publicitaires, il l’oblige aussi à offrir gratuitement de l’espace publicitaire à Sony Music, espace que Sony a tous les droits de revendre par après pour la somme qu’il veut. Preuve de plus, s’il en est, que la major a particulièrement bien soigné son contrat.
Combien Sony est-il payé par écoute?
Mais comme le souligne The Verge, la plus grande question reste de savoir combien Sony Music est payé par écoute. Eh bien… « c’est compliqué ». D’une part parce que tous les utilisateurs de Spotify ne se valent pas (comptes gratuits vs payants), d’une autre parce que ceux-ci ne payent pas Spotify à l’écoute, mais bien via un abonnement ou via les revenus publicitaires. Si 60% des bénéfices de Spotify vont directement aux labels, et sont ensuite répartis proportionnellement, le calcul de répartition des revenus est plus complexe: soit, d’un côté, un minimum de 0,00225$ assuré par écoute en streaming, soit, dans le cas de grande écoute, le montant versé à Sony devient alors directement proportionnel à l’apport financier des utilisateurs de Spotify. Pour des albums très attendus et écoutés massivement, c’est le pactole pour Sony.
Ce qui arrive en fin de course dans le portefeuille des artistes n’est évidemment pas précisé ici, mais est bien sûr tributaire du contrat qui les lie avec Sony Music. Si certains (coucou Geoff Barrow!) doivent avoir particulièrement mal négocié ceux-ci en ce qui concerne le streaming et n’en touchent que 15 à 20%, d’autres sont plus généreusement servis. De là à remettre tout le système de répartition en cause, il n’y a qu’un pas qui ne risque pourtant pas d’être franchi de sitôt…
Plus de détails (et le pdf du contrat) sur le site de The Verge.
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