Critique | Musique

[L’album de la semaine] Jean-Louis Murat – Morituri

Jean-Louis Murat © Franck Loriou
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

POP | Comme tout le monde ébranlé par l’actualité, l’Auvergnat palpe l’air du temps et raconte à sa manière une tragique année 2015. Morituri te salutant…

L’artwork initial de l’album le présentait mourant, entouré de fleurs. Tel un caïd de la mafia qui venait de se faire liquider. Sur la pochette anxiogène et toute symbolique du nouveau Jean-Louis Murat, le quinzième (et le reste) en 35 ans de carrière, deux cygnes blancs se tournent finalement le dos. L’eau est noire, l’ambiance inquiétante et l’avenir terriblement incertain. Ce disque, écrit durant l’été et enregistré à Paris en novembre, quatre jours seulement après l’assaut donné par le RAID à Saint-Denis, l’Auvergnat l’a intitulé Morituri (« ceux qui vont mourir »). Flippante résonance avec les événements tragiques ayant ébranlé la France en 2015. Les attentats de Charlie Hebdo en tête.

Matthieu Chedid et sa soeur Anna (Comme un seul homme), Grand Corps Malade (#Je suis Charlie) ou encore Johnny Hallyday (Un dimanche de janvier) avaient déjà pondu des morceaux marqués par le massacre au siège du journal satirique… C’est tout l’album de Murat qui est frappé (sans directement les aborder) des affres de l’actualité. Après avoir chanté avec Rose (Pour être deux) et écrit quelques textes des Songes de Léo, conte musical de Morgane Imbeaud (ex-Cocoon) qui vient ici pousser la chansonnette (dans un anglais que pourtant Jean-Louis honnit) dans Nuit sur l’Himalaya, Murat voulait sortir de son canton et palper l’air inquiétant du temps. Son disque a été composé avant le Bataclan et il n’en a pas changé une ligne. Pas un mot même. Ses propos, comme toujours très imagés, en font presque un visionnaire. Interroge la jument évoquant un carnage en terrasse alors que toutes les chansons étaient écrites au 1er septembre.

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Costard cravate

« Chanter pour ce peuple à la con, c’est comme chanter pour une marmite. Ce n’est guère enthousiasmant », déclare JLM, la langue toujours bien pendue, dans le dernier numéro de Magic, la revue pop moderne. Murat avait enregistré son double album Babel avec le Delano Orchestra. Il est cette fois accompagné par des musiciens venus du classique et de l’improvisation jazz: Gael Rakotondrabe aux claviers (Antony and the Johnsons, CocoRosie, Pierre Lapointe), Christopher James Thomas à la basse (Ray LaMontagne) et Stéphane Reynaud à la batterie…

Le costard, la cravate, les lunettes noires et le cheveu gominé… L’Auvergnat s’est rhabillé en même temps qu’il a relooké sa musique. La voix est apaisée. L’ambiance classe comme celle d’un vieux club de jazz enfumé qui va bientôt fermer. Réaction au stress, à la peur et la laideur du quotidien. Les sept minutes de Frankie et La Pharmacienne d’Yvetot résument à merveille la démarche d’un Murat inspiré. Un Murat qui a écouté la radio, lu la presse et pris des notes pour raconter en s’en détachant cette funeste année. Refusant avec soin toute idéologie et tout propos politique.

Après l’Auvergne et la France, Murat dit vouloir s’attaquer à l’Europe. « Enregistrer son prochain disque après avoir sillonné les 28 pays en famille en commençant par Bruxelles, Rome et Barcelone. » A en juger par les premiers mois de 2016, ce ne sont pas les idées qui lui manqueront…

DISTRIBUÉ PAR PIAS.

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