Les soirées chez mathilde

DE DOMINIQUE FABRE, ÉDITIONS DE L’OLIVIER, 236 PAGES.

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Paris, début des années 80. Un étudiant désoeuvré et sans racines traîne sa solitude du côté de la Porte de Clignancourt, quartier populaire et métissé de la capitale. Il a ses habitudes dans un petit bar où se mêlent parieurs et immigrés clandestins. Une vie terne qui s’illumine ponctuellement au contact de deux personnalités fréquentant également le bistro: Ahmed Sid Ahmed, un Égyptien en transit dont il est secrètement amoureux, et surtout Julien, ingénieur français exubérant et charismatique qui va lui ouvrir les portes de son univers, celui de la banlieue verdoyante et un peu bohème de Sèvres où vit Mathilde, sa compagne. « Mathilde était petite, très brune et mince. Elle avait les yeux clairs. Bonjour, elle m’a tendu la joue. Son sourire éclate mais, à sa façon, il reste empreint de la même discrétion que toutes ses paroles. » Lors de soirées réunissant une faune bienveillante, le jeune homme qui est aussi le narrateur découvre un paradis perdu gravitant en orbite autour de l’ancienne danseuse, astre fragile et éblouissant qui forme avec « l’Ingé » une sorte de couple de cinéma. Un monde à la fois très proche et très lointain de Paris, qu’il retrouve chaque lendemain de veille comme si la conscience de ne pas appartenir au même milieu l’empêchait de s’incruster durablement. Un charme pudique et envoûtant enveloppe ce récit à l’intrigue vaporeuse qu’habille la petite musique d’une époque qui vit ses dernières heures d’innocence, l’épidémie de sida se profilant à l’horizon. La langue sensible de Dominique Fabre excelle à saisir les êtres et la ville dans un halo d’incertitude et de mystère, comme des bribes de souvenirs flottant à la surface du passé.

L.R.

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