Critique

[Critique ciné] Black Mass (Strictly Criminal), main basse sur la ville

Johnny Depp dans Black Mass (Strictly Criminal) © DR
Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

POLAR | Avec un Johnny Depp retrouvé, Scott Cooper signe un maître polar autour de James Whitey Bulger, truand ayant imposé sa loi à Boston dans les années 70.

Boston, au coeur des années 70. Avec le gang de Winter Hill, James Whitey Bulger (Johnny Depp, lire son portrait dans le Focus du 20 novembre), un caïd d’origine irlandaise, impose sa loi dans les quartiers sud de la ville, n’étant concurrencé dans le business du crime que par la mafia italienne. Moment où John Connolly (Joel Edgerton), un ami d’enfance devenu inspecteur du FBI chargé d’éradiquer cette dernière, lui propose un marché en apparence contre-nature: collaborer avec l’agence fédérale afin d’éliminer leur ennemi commun. Nonobstant les scrupules d’usage -le truand a traditionnellement la main lourde à l’encontre des balances-, Bulger entrevoit rapidement les bénéfices qu’il pourrait tirer de l’entreprise, à condition toutefois de la court-circuiter à sa guise…

La texture des années 70

Une histoire vraie sert de socle à Strictyl Criminal, polar poisseux explorant les rapports complexes qui vont s’installer entre les deux hommes, l’un et l’autre à la veille d’une ascension en apparence irrésistible. Auteur, précédemment, des fort estimables Crazy Heart et Out of the Furnace, Scott Cooper tire de cette intrigue sinueuse un film à la facture irréprochable. Classique dans sa forme sinon dans son contenu, Strictly Criminal renoue ainsi élégamment avec la texture du cinéma américain des années 70. Et Sidney Lumet, William Friedkin ou Francis Ford Coppola sont quelques-uns des noms qui viennent à l’esprit à la découverte de ce polar tortueux dont jusqu’au grain (on saluera au passage la photographie de Masanobu Takayanagi) et la densité semblent d’époque.

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On boude d’autant moins son plaisir que, retrouvant là un rôle à sa mesure, Johnny Depp profite de l’occasion pour se réinventer, renaissant devant la caméra de Cooper tel le phoenix de ses cendres. Le cheveu rare et le look cintré, l’acteur, méconnaissable, signe une composition soufflante, la folie affleurant au coin d’un regard qu’il a faussement aimable derrière ses lunettes teintées. Un grand numéro, assurément, qu’il veille toutefois à circonscrire dans les limites de la déraison, échappant à la dérive grimaçante que l’on était en droit de redouter, eu égard à ses dernières sorties. A ses côtés, c’est l’ensemble de la distribution qui se révèle sans accrocs, les Joel Edgerton, Benedict Cumberbatch ou autre Kevin Bacon offrant toutes les garanties de crédibilité et de solidité. Soit de la fort belle ouvrage, et un maître polar vintage. Tout au plus si l’on regrettera que Scott Cooper ne se soit pas aventuré au-delà de la seule intrigue policière, alors qu’une parabole sur l’Amérique et ses démons lui tendait les bras, qui aurait pu faire de ce Strictly Criminal le pendant bostonien au magistral A Most Violent Year de J.C. Chandor…

DE SCOTT COOPER. AVEC JOHNNY DEPP, JOEL EDGERTON, BENEDICT CUMBERBATCH. 2H03. SORTIE: 25/11.

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