Critique

[Critique ciné] 21 nuits avec Pattie, les affranchis

André Dussolier et Isabelle Carré dans 21 Nuits avec Pattie © DR
Jean-François Pluijgers
Jean-François Pluijgers Journaliste cinéma

COMÉDIE | Partie enterrer sa mère, une jeune femme coincée trouve matière à se libérer dans le sud de la France. Une comédie hédoniste et libertaire des frères Larrieu.

Voilà une quinzaine d’années maintenant que les frères Larrieu suivent une voie sans guère d’équivalent dans le cinéma français, les ayant conduits d’une Fin d’été aux Derniers jours du monde, avec détour par les Pyrénées. Si Peindre ou faire l’amour tenait lieu, en 2004, de manifeste de l’oeuvre, 21 nuits avec Pattie en apparaît aujourd’hui comme la déclinaison avantageuse, convoquant avec bonheur un esprit définitivement libertaire à la teneur délicieusement hédoniste.

La partie n’est pas acquise d’emblée pour autant: les circonstances qui emmènent Caroline (Isabelle Carré) dans un petit village du sud de la France ne sont autres, en effet, que les funérailles de sa mère, Elisabeth (dont elle apprendra qu’on la surnommait Zaza), une avocate volage dont elle n’avait de nouvelles que de loin en loin. Pour l’heure, cette Parisienne quelque peu effacée vogue surtout de surprise en surprise, entre les voisins jouissant, aussi décontractés que dénudés, de la piscine de la maison maternelle, et Pattie (Karin Viard), l’accorte femme veillant sur ce petit monde. Et qui, à peine l’a-t-elle accueillie, brûle, de toute évidence, de lui détailler par le menu ses aventures amoureuses fort épicées avec la plupart des hommes du coin -André le chasseur, Alain le vigneron et beaucoup d’autres…-; une communauté que la perspective des fêtes du 15 août plonge dans une douce euphorie à laquelle Caroline semble imperméable. La jeune femme n’a pourtant encore rien vu, puisque, parmi d’autres épisodes rocambolesques, le corps de sa défunte mère disparaît de la « chambre froide » où il reposait, tandis que débarque impromptu Jean (André Dussollier), un individu dont il s’avère qu’il pourrait aussi bien être un écrivain célèbre tenant à son incognito qu’un nécrophile… De quoi se perdre en conjectures, aussi vrai que « la vierge du 15 août arrange ou dérange tout ».

En toute liberté

Le simple énoncé du « pitch » de 21 nuits avec Pattie suffit à en donner la mesure joyeusement farfelue. Plus que d’une quelconque pochade, c’est toutefois de cinéma en toute liberté qu’il s’agit, et la coloration fantastique que donnent les Larrieu à cette proposition insolite n’en constitue pas l’aspect le moins réjouissant. Si cette échappée campagnardese décline notamment comme une histoire de fantômes, il y est aussi question, l’air de rien, de la vie, de la mort, du sexe, de l’amour et même de se réinventer. Toutes choses essentielles envisagées avec une stimulante légèreté, pour un film affranchi de carcans narratifs et autres; une comédie échevelée que Karin Viard et Isabelle Carré portent vers des sommets, incarnant avec gourmandise cette rencontre explosive entre le verbe débridé et une nature réservée. Jubilatoire.

D’ARNAUD ET JEAN-MARIE LARRIEU. AVEC ISABELLE CARRÉ, KARIN VIARD, ANDRÉ DUSSOLLIER. 1H55. SORTIE: 16/12.

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