Where the Wild Things Are, un moyen temporaire d’échapper au diktat névrotique “travailler-consommer”

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Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

Festival prisé, Horst se découvre également comme une sorte de tiers-lieu d’expérimentations plastiques. Passionnant.

Ancienne base militaire située au bord de la Senne, ASIAT vit au rythme de nouvelles vibrations depuis cinq ans. Aux bruits de bottes ont succédé les infrabasses promues par Horst, une organisation festivalière conscientisée et inclusive dont l’approche peut être envisagée comme une alternative à la mégalomanie consumériste d’un Tomorrowland. L’événement s’articule en deux volets. Le premier, axé sur la musique, condense trois jours d’intensité festive. Au-delà, la manifestation déroule un second temps consistant en une série de propositions plastiques sous la houlette d’Evelyn Simons. “Cet endroit a été partiellement repris par la nature, je le considère comme la ruine d’une ancienne structure de pouvoir sur laquelle nous avons la possibilité d’ériger une sorte de nouveau district urbain”, note la commissaire, qui a été secondée par Margot Bossy pour les question de production. Forte de cette responsabilité, la curatrice a changé son fusil d’épaule au moment d’imaginer la programmation de l’édition 2023 de Horst Expo. En ligne de mire? Un autre modèle de vivre-ensemble. Pour ce faire, Simons a commandité plusieurs œuvres d’art spécialement conçues afin de répondre aux enjeux de ce lieu taillé pour faire place à différentes formes de désobéissance, parfois inattendues comme le night-shop ou le tuning.

Hétérotopie

Where the Wild Things Are, qui doit son nom au célèbre album jeunesse de Maurice Sendak (Max et les Maximonstres en français) se découvre comme un moyen temporaire d’échapper au diktat névrotique “travailler-consommer” qui plane sur nos vies. Il est question ici d’autres circuits, de la mobilisation d’autres énergies. Dès l’entrée, une vidéo, montrée à la dernière Biennale de Venise par l’Italienne Elisa Giardina Papa, figure la réappropriation de l’espace en croisant des formes de résistance au pouvoir, qu’il s’agisse de l’exemple “donne di fuora”, une tradition orale sicilienne, ou de la mise en scène des errances de l’urbanisme postmoderne dans la petite ville de Gibellina Nuova. L’entrée en matière est pour le moins percutante. Elle est suivie par Maria Muehombo, qui a élaboré une canopée biomimétique au chromatisme frappant -les pigments ont été glanés sur place-, dont les contours évoquent une nature puissante et dangereuse. Plus loin, l’œil se porte vers la fascinante fontaine en circuit fermé imaginée par la Belge Sharon Van Overmeiren. Érigée à partir de matériaux de construction triviaux -des briques dont l’artiste a érodé le facture industrielle-, cette installation qui évoque une stupa népalaise fait valoir une fonction concrète de rafraîchissement sur fond de système ancestral. Il faut également mentionner une menaçante projection ciblant la question d’une nature sans cesse médiée par les écrans de Mark Leckey, prix Turner 2008, mais aussi l’architecture radicale de Marc Leschelier ou encore un bout de végétation très Lewis Carroll de Farah Al Qasimi.

Where the Wild Things Are

Exposition collective, sur le site ASIAT, à Vilvoorde. Jusqu’au 30/07.

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