Critique

Critique ciné: Grace de Monaco

Nicole Kidman en Grace Kelly © Julien Panie
Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

FILM BIOGRAPHIQUE | L’échec était envisageable. Il est flagrant, navrant. Même Nicole Kidman n’échappe pas au naufrage…

La semi-réussite du chaleureux, engageant mais tout de même fort inégal La Môme a sans aucun doute poussé Olivier Dahan à se croire un talent pour le film biographique. Celui qui disait s’être identifié à l’Edith Piaf jouée par Marion Cotillard s’est piqué d’évoquer à l’écran une autre figure féminine mythique, à l’existence plus grande que la vie (larger than life). Dahan l’adore, c’est sûr, l’actrice américaine préférée d’Hitchcock, tombée amoureuse d’un « prince charming » venu en voisin de son palais de Monte Carlo à celui du Festival de Cannes où Grace Kelly et Rainier III se virent et tombèrent amoureux l’un de l’autre. De conte de fées, il ne fut question que dans les médias et l’imaginaire populaire (1). L’action du film se déroule au début des années 60, quelques années après le mariage princier. Elle se concentre sur deux événements. D’abord la brève mais significative visite d’un Alfred Hitchcock proposant à son actrice de Rear Window et To Catch A Thief de tourner un nouveau film pour lui. Marnie, portrait d’une kleptomane inhibée sexuellement, marquerait le retour devant les caméras de la star, qui s’avoue tentée. Rainier est sur le point d’accepter quand se produit le second événement: une grave crise avec la France, dont Monaco est le protectorat.

Aux confins du grotesque

De Gaulle, irrité de voir de nombreux industriels et hommes d’affaires français élire domicile fiscal dans la principauté pour éluder l’impôt, exige le payement d’importantes compensations, sous menace de blocus et même d’invasion rattachant Monaco au territoire français! Interprétant librement le contexte historique, Olivier Dahan et son scénariste Arash Amel montrent une Grace apportant une collation aux gendarmes français campant sur la frontière, puis prononçant devant un parterre de responsables politiques (dont de Gaulle) un discours aussi vibrant et exalté que… grotesque. De l’évocation potentiellement intéressante du passage d’un statut d’icône à l’autre, d’une vie à l’autre, on passe de consternante façon à une défense et illustration des vertus d’un paradis fiscal! Le tout filmé avec lourdeur, et joué sans… grâce par une Nicole Kidman manquant tout à la fois de crédibilité (comme le pauvre Tim Roth enrayé en Rainier) et même de rayonnement devant la caméra. Un comble!

  • D’OLIVIER DAHAN. AVEC NICOLE KIDMAN, TIM ROTH, FRANK LANGELLA. 1H43. SORTIE: 21/05.

(1) GRACE KELLY DEVENUE PRINCESSE AVAIT À CE SUJET UNE FORMULE: « LE FAIT QU’ON DISE DE MA VIE QU’ELLE EST UN CONTE DE FÉES EST EN LUI-MÊME UN CONTE DE FÉES »…

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