Critique

[Critique ciné] Brooklyn, entre deux rives

Saoirse Ronan et Emory Cohen dans Brooklyn de John Crowley. © DR
Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

DRAME/ROMANCE | Deux pays, deux hommes, deux vies, s’offrent à l’héroïne d’un film attachant, superbement joué par Saoirse Ronan.

La grande famine de 1845-1848 avait déclenché une émigration massive (deux millions!) d’Irlandais vers les Etats-Unis. Un siècle plus tard, traverser l’Atlantique et y entamer une vie riche de nouveaux espoirs restait chose familière pour les citoyens d’Eire. Nous sommes au début des années 50 quand Eilis -prononcer le « s » final « sh »- entreprend le voyage. La jeune fille ne trouve guère d’opportunités dans son pays natal où elle vit avec sa mère et sa soeur aînée. A New York, à Brooklyn plus précisément, les immigrés venus d’Irlande affichent leur solidarité. Trouvés par un curé de là-bas, un job et un logement attendent déjà Eilis Lacey. Le départ n’en sera pas moins déchirant, et les tout débuts en Amérique un peu rudes. Mais la nouvelle venue s’adaptera vite au mode de vie local, entreprendra des études… et rencontrera l’amour sous les traits bienveillants d’un jeune plombier d’origine italienne.

Cruel dilemme

Ainsi commence Brooklyn, portrait sensible et attachant d’une jeune femme découvrant une autre existence, développant son potentiel et entrevoyant la possibilité du bonheur, avant qu’un drame intime ne la fasse hésiter entre deux destinées. L’atout numéro un du film est l’interprétation magnifique de Saoirse Ronan. Elle-même née à New York de parents irlandais, puis élevée dans la banlieue de Dublin, l’actrice de 21 ans nourrit le personnage d’Eilis d’un ressenti tout personnel. Le dilemme vécu par l’héroïne, entre deux mondes, deux cultures, lui inspire une prestation d’un raffinement, d’une complexité mais aussi d’une limpidité peu banals. Lovely Bones l’avait révélée avant les confirmations de The Way Back, Hanna, Byzantinium, The Grand Budapest Hotel et Lost River. Brooklyn lui apporte le tout grand rôle que son talent mérite, et elle en tire un fascinant parti.

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De la réalisation de John Crowley (Intermission, Boy A), on peut dire qu’elle adopte un sage classicisme et s’efface intelligemment pour faire écrin à l’émotion que génèrent au naturel Eilis et son parcours. Nick Hornby, adaptant avec lui le roman de Colm Toibin, fait de même avec un scénario très fluide, évitant les pièges de la psychologie. De quoi laisser s’exprimer la justesse d’une jeune comédienne s’identifiant à son personnage avec la plus claire, la plus belle évidence. Ronan possédant un tranchant qui repousse au plus loin toute mièvrerie, et secoue la couche de sucre qu’un projet somme toute très « old fashion » aurait pu déposer sur une performance moins moderne.

De John Crowley. Avec Saoirse Ronan, Domhnall Gleeson, Emory Cohen. 1h53. Sortie: 24/02.

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