Corinne Bailey Rae et Jack Johnson: simplicité et authenticité

© Olivier Donnet

Traiter sa douleur par l’art, panser ses plaies en créant, c’est une chose. Devoir par la suite la chanter sur scène, y compris celle de festival comme Werchter, il y a un pas. Derrière The Sea, dernier album de Corinne Bailey Rae, plane l’ombre de son mari, le musicien Jason Rae, décédé d’une OD accidentelle. Cela n’en fait pas un disque de deuil.

D’ailleurs, il a été en grande partie écrit avant le drame, rappelle la chanteuse, autant par souci d’honnêteté que par volonté de se protéger. Peu importe : mélancolique, The Sea n’est jamais morbide. Sur scène, le procédé est pareil. La fêlure n’est pas loin (Love’S On Its Way), mais sans jamais en rajouter, Bailey Rae enchaînant directement avec un morceau plus up tempo (Blackest Lily).

En fait, l’ambiance est plutôt tranquille, à l’image de la chanteuse métisse, tige à la chevelure imposante dans sa combinaison lamée, délicate mais pas précieuse.  » On va y arriver « , sourit-elle, quand elle explique que certains s’inquiétaient de la voir débarquer dans un festival rock. Ses langueurs pop/soul tiennent en effet la route, quitte à empoigner une guitare pour rallonger par exemple un titre comme Are You Here. Il y a ainsi dans l’interprétation de Bailey Rae quelque chose qui tient autant de l’intensité que de la simplicité. Et de livrer un concert pareil à sa personne : joli (et on ne parle pas (que) de son physique)

Jack Johnson enchaînait plus tard sur la même scène. Jusqu’ici, le surfer d’Honolulu ne s’était produit qu’une seule fois en Belgique. C’était en 2001, dans le club de l’Ancienne Belgique. C’est dire si l’attente était considérable dans un marquee bourré et chauffé à blanc. Lui est plutôt cool. On veut dire : pas branché, non. Mais relax. Complètement décontracté, comme ses potes/musiciens (basse, batterie, clavier).  » Vert  » aussi : sur la scène, ce sont des gobelets recyclables et des gourdes qui ont été disposés.


La musique est à l’avenant : d’un naturel désarmant, agréable comme une douche tiède. Sous le soleil de JJ, il n’y a rien de bien neuf : les titres, entre folk tranquille et rock peinard, défilent comme créés en direct, au coin d’un feu de camp. Ce sont moins des chansons que des sentiments, une sorte de feel good music, à la fois inoffensive et essentielle.

En fait, en programmant Corinne Bailey Rae et Jack Johnson, en face de Paramore et Thirty Second to Mars présents eux sur la grande scène, Rock Werchter ne proposait pas seulement deux podiums, mais carrément deux festivals différents. Les grosses machines teenagers d’un côté ; une certaine simplicité et authenticité de l’autre. En cette fin d’après-midi tropicale, on a fait notre choix…

Laurent Hoebrechts à Werchter

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