À la télé cette semaine: Montage of Heck, Coup de torchon, Taxi Téhéran, Easy…

Nicolas Clément
Nicolas Clément Journaliste cinéma

Films, séries, documentaires: qu’y a-t-il à voir à la télévision cette semaine? Voici notre sélection télé, du 10 au 16 février.

TRANSPORTS DU FUTUR: À LA RECHERCHE DE LA VITESSE

Documentaire de Tamar Baumgarten-Noort. ***(*)

Samedi 10/2, 22h25, Arte.

À la télé cette semaine: Montage of Heck, Coup de torchon, Taxi Téhéran, Easy...
© DR

À défaut de pouvoir se télétransporter (on en a tous un jour rêvé), l’homme de plus en plus impatient cherche des nouvelles manières efficaces et rapides de se déplacer. À Los Angeles, le milliardaire Elon Musk a même organisé un concours industriel international pour réinventer le transport rapide. L’idée? Une capsule circulant dans un tube à vide capable d’atteindre des pics à 1200 km/h, la vitesse du son, et donc de vous emmener de Paris à Berlin en moins de 60 minutes. Son nom? L’hyperloop. Le documentaire de Tamar Baumgarten-Noort suit les balbutiements de cette quête insensée en même temps qu’il s’interroge sur la voiture autonome (en mai 2017, Joshua Brown est devenu la première victime d’un accident mortel impliquant un véhicule de ce type) et questionne les défis de l’ultramobilité. Un docu futuriste qui interpelle par une vieille anecdote: celle du réseau de tramway de Los Angeles, acheté par un consortium de compagnies pétrolières, de fabricants automobiles et de pneus pour mieux le démanteler. Ce n’est définitivement pas gagné… J.B.

COUP DE TORCHON

Film noir de Bertrand Tavernier. Avec Philippe Noiret, Isabelle Huppert, Jean-Pierre Marielle. 1981. ****

Lundi 12/2, 20h50, Arte.

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Le cycle consacré par Arte à Bertrand Tavernier propose une soirée de choix, avec en seconde partie (à 22.55) le rare et fascinant La Mort en direct, réalisé en 1980 avec Romy Schneider. Coup de torchon, programmé deux heures plus tôt, marque un sommet de la filmographie du cinéaste lyonnais. Adaptant le roman de Jim Thompson 1275 âmes, Tavernier en transpose l’action du Texas en… Afrique coloniale française, vers la fin des années 1930. Philippe Noiret campe l’unique policier d’une petite ville où sa réputation de lâcheté, de médiocrité, lui valent un mépris presque généralisé. Mais attention: la revanche de cet homme sans qualité sera terrible, sanglante… Coup de torchon allie l’humour à la noirceur, dans une atmosphère poisseuse où Guy Marchand et Eddy Mitchell s’inscrivent bien. Isabelle Huppert apporte sa part de lumière à un film policier vraiment pas comme les autres, et ne jouant aucunement de la nostalgie coloniale… L.D.

HERE AND NOW

Série créée par Alan Ball. Avec Holly Hunter, Tim Robbins, Jerrika Hinton, Raymond Lee, Daniel Zovatto, Sosie Bacon. ****

Lundi 12/2, 21h05, Be 1.

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Entre 2001 et 2005, Alan Ball nous avait empoigné par le col pour nous faire regarder, au travers de sa série Six Feet Under, la mort et la famille au fond des yeux -et nous tirer au passage quelques larmes. Deux ans après le film American Beauty et trois avant sa deuxième série True Blood, il promenait un regard métaphorique sur les questions et les angoisses de l’Amérique contemporaine avec humour, tendresse, empathie et cruauté. Cette oeuvre semble se prolonger avec Here and Now, qui suit les membres d’une famille multiraciale dont le père, Greg Boatwright (Tim Robbins), est aux portes de la soixantaine. Philosophe jadis influent et instigateur d’une théorie de poche mariant épicurisme et présentisme (on songe à Jon Kabat-Zinn, qui a popularisé les notions d’instant présent, « here and now », et la pleine conscience), il a adopté, il y a une vingtaine d’années, avec sa femme Audrey (Holly Hunter), trois enfants originaires de Colombie (Ramon), du Vietnam (Duc) et de Somalie (Ashley), avant que naisse leur fille biologique (Kristen). Ramon puis Duc sont atteints de visions qui troublent le champ du réel, semblent convoquer une mémoire traumatique refoulée ou un inconscient collectif qui attend d’être nommé, ainsi qu’un symbole aussi récurrent que cryptique: « II:II ». Si, au bout du 4e épisode, la nature de ces hallucinations a secoué la famille de questions mais n’a toujours pas débouché sur un quelconque début de réponse, la série s’est déjà manifestée, en revanche, comme un catalogue piquant des maux de l’Amérique de Trump: le racisme et la transphobie; le culte de la performance et de l’apparence; le personal branding qui transforme les individus en narcisses mythomanes; la technodépendance; la défaite des idéaux progressistes; le confusionnisme et le fascisme latents; les abus sexuels et le viol; les fake news et les vérités alternatives; la nature perçue comme une entité extérieure, à dominer; une société globalement en burn out, à l’image de Greg, en larmes, garé en bord de route. C’est assez bien vu de la part d’Alan Ball, qui confirme donc la qualité de son écriture poétique et anthropologique, portée par des acteurs sublimes et une réalisation sobre. Espérons que le reste de la saison ne laissera pas la dimension surnaturelle, jusqu’ici parcimonieuse mais très évocatrice (on n’en dit pas plus), sombrer dans l’ésotérisme pompeux. N.B.

LA FAMILLE FIFA

Documentaire de Niels Borchert. ***(*)

Mardi 13/2, 22h20, Arte.

À la télé cette semaine: Montage of Heck, Coup de torchon, Taxi Téhéran, Easy...
© DR

« La FIFA, c’est comme les Sopranos mais en pire », dit avec tout son sens de la formule le journaliste, consultant sportif et écrivain Philippe Auclair. Avec dans le rôle de Tony ce bon vieux bandit de Sepp Blatter, a-t-on envie d’ajouter. Ce n’est cependant pas lui le fil rouge du documentaire réalisé par Niels Borchert mais bien Chuck Blazer. Ancien homme fort du ballon rond sur le continent américain, Blazer, qui louait un appartement pour ses chats dans la Trump Tower à 5.500 dollars par mois, figurait au coeur du scandale de corruption qui a frappé en 2015 la Fédération internationale de football. Il a même joué les informateurs pour le FBI. Comment le Qatar a acheté la Coupe du monde? C’est en gros l’histoire de ce docu guidé par Mary Lynn Blanks, son ex-compagne (Blazer est mort en juillet). Et, en même temps, le résumé de ce qui se fait d’habitude à la FIFA, des dessous-de-table ayant de toute évidence été versés pour les Coupes du monde en France, en Allemagne et en Afrique du Sud. « Ce n’est pas le Qatar qui a établi les règles, commente Phaedra Almajid, une ex-chargée de communication. Je crois que c’est la FIFA. Le Qatar a simplement joué le jeu. » Aussi effrayant qu’écoeurant. J.B.

TAXI TÉHÉRAN

Comédie dramatique de Jafar Panahi. Avec Jafar Panahi. 2015. ****

Mercredi 14/2, 20h55, Arte.

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Programmé dans le cadre d’une soirée « spéciale Berlinale » (le Festival de Berlin se déroule du 15 au 25 février), Taxi Téhéran reflète le courage et la passion d’un Jafar Panahi assigné à résidence et interdit de tournage. Bravant ses censeurs et le totalitarisme du régime théocratique iranien, le grand cinéaste (Le Miroir, Le Cercle, Hors-jeu) a emprunté un taxi pour y tourner son film aussi discrètement que possible. Il joue un chauffeur qui prend à son bord plusieurs clients représentatifs de la société de Téhéran. Attention! Ceci n’est pas un documentaire! Panahi joue avec brio de la fiction et de la réalité, au point qu’elles se confondent dans un film souvent drôle, révélant les différences entre classes et milieux, les paroles libres aussi, que le régime ne veut pas entendre. Dans la voiture, un espace est ouvert, rebelle à la répression et d’une remarquable vérité humaine. À voir absolument! L.D.

OCCUPIED, SAISON 2

Série créée par Erik Skjoldbjærg et Karianne Lund. Avec Eldar Skar, Ane Dahl Torp, Henrik Mestad, Hyppolite Girardot, Janne Heltberg. ****

Jeudi 15/2, 20h55, Arte.

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La première saison de ce thriller norvégien avait passablement mis Vladimir Poutine hors de ses gonds, et pour cause: en pleine crise ukrainienne, imaginer la Russie envahir la Norvège, passée aux énergies vertes, pour s’emparer de ses réserves de pétrole et de gaz avait tout d’un coup de Jarnac -l’invasion, plus tard, de la Crimée y a fait un écho cinglant. Mais voilà: Occupied dépassait la géopolitique de bac à sable pour explorer les ressorts de la crise énergétique et son impact sur la démocratie norvégienne. Comment réagir à l’occupation? Sommés de prendre position, que feraient les politiques? Les citoyens? La seconde saison poursuit ce fil intelligent et s’ancre même dans une durée qui laisse les personnages déployer leur complexité et la zone de gris s’étendre à toute l’histoire. Jesper Berg, le premier ministre, a quitté Oslo et organise la résistance depuis Stockholm à travers une messagerie de jeu vidéo, tout en entretenant une liaison avec l’ambassadrice de Russie. Sur les rives des fjords, entre deuils, collaboration et luttes, l’humanité est mise à rude épreuve. Dans toute sa trivialité, sa banalité froide, la situation qui a succédé au coup de force est racontée avec une justesse psychologique qui fait de cette série bien plus qu’une anticipation: un miroir tendu à nos renoncements ou nos engagements présents. N.B.

BANSHEE

Série créée par Jonathan Tropper et David Schickler. Avec Antony Starr, Ivana Milicevic, Ulrich Thomsen, Frankie Faison, Lili Simmons. ***

Jeudi 15/2, 21h05, Be 1.

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Banshee n’a aucun rapport avec le blase d’origine du héros Marvel et X-Man Le Hurleur. C’est celui d’un patelin perdu dans l’enclave amish de Pennsylvanie dans lequel Lucas Hood, qui vient de purger une peine de prison pour vol de diamants, s’en va tenter de reconquérir son ancienne copine. Ses piètres talents d’arnaqueur, ainsi qu’un fâcheux concours de circonstances, suffisent à le faire passer pour le shérif local fraichement désigné. Las, Lucas est un véritable chat noir, capable de tomber de Charybde en Scylla comme un canari saute d’un perchoir à l’autre de sa cage. Son nouveau métier le met donc aux prises avec la terreur locale. Et ce n’est pas le seul danger que devra affronter Hood qui, pour sa part, n’a rien d’un enfant de coeur. Empruntant aux codes du western et du thriller trash, Banshee se traverse comme jadis Prison Break, avec encore plus de violence, de sang et de chair. Voulant percer à jour les troubles d’une Amérique étouffée dans ses rapports de force scélérats, la série, produite par Alan Ball -encore lui- se délecte au final un peu trop de la perversité qu’elle entend décoder. N.B.

MONTAGE OF HECK

Documentaire de Brett Morgen. **(*)

Vendredi 16/2, 23h00, Arte.

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« Kurt détestait être humilié. Il détestait ça. Dé-tes-tait ça. S’il pensait être humilié, tu voyais la rage sortir. Donc, il était toujours attentif et prudent quant à la manière avec laquelle l’art et le travail étaient présentés. » En entendant les propos du bassiste de Nirvana Krist Novoselic, on ne peut s’empêcher d’imaginer ce qu’aurait pensé Kurt Cobain en matant calmement à côté de nous, affalé dans le fauteuil, le documentaire Montage of Heck réalisé par Brett Morgen (Crossfire Hurricane). Visuellement, l’objet est plutôt réussi. Basé sur l’art, la musique, des films Super 8 et des enregistrements audio fournis par la famille de la rock star écorchée, le film présenté en 2015 au festival de Sundance comprend même des scènes audacieuses en dessin animé. Scènes qui, esthétiquement, fonctionnent d’ailleurs plutôt bien. Le problème n’est pas tant dans la forme que dans le fond: le portrait terriblement impudique, à sa manière stylisé et voyeuriste, d’une icône. Ou plutôt d’un fils, d’un mari, d’un père puisque plus que de tout autre chose, c’est de ça dont il s’agit ici. Pas de considérations sur les Melvins et les Vaselines, pas de connexion avec la scène Riot Grrrl d’Olympia ni de vrai zoom sur l’explosion grunge… Il est finalement très peu question de musique. Montage of Heck mise plutôt sur une intimité qui, très vite, rend mal à l’aise. Morgen sort le certificat de naissance de Kurt Donald Cobain. Des images de lui quand il était petit sur All Apologies en version comptine pour enfant… Puis d’autres choses nettement plus glauques. Ses relations compliquées avec sa famille. Les circonstances dérangeantes de ses premiers ébats sexuels (avec une dégénérée). Ou encore les interactions entre lui et sa femme, d’apparence défoncés, et leur fille encore bébé… Frances (qui est apparemment à l’origine du projet) n’apparaît pas dans ce portrait intégralement autorisé. Contrairement à quasi tout le reste de la famille… Wendy O’Connor, la maman de Kurt. Don Cobain, son père. Jenny, sa belle-mère. Ou encore sa soeur Kim et bien évidemment sa veuve: la vilaine Courtney Love… Bienvenue dans le grand déballage de choses que vous n’avez pas envie de savoir. Tracy Marander, une des anciennes petites amies de l’icône grunge, et Krist Novoselic sont les personnes les plus éloignées de lui à s’exprimer. Près de 85% des séquences ont beau être inédites, regarder Montage of Heck (du nom d’un collage sonore réalisé sur une cassette par Kurt en 1988) est aussi perturbant et questionnant que de se plonger dans son journal intime profané il y a 15 ans. Nonante pourcents de ce qui est raconté dans le film est faux, garantit par-dessus le marché l’ami de Cobain, Buzz Osborne… Julien Broquet

EASY (SAISON 2)

Une série Netflix créée par Joe Swanberg. Huit épisodes d’une trentaine de minutes. ***

Disponible sur Netflix.

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Figure majeure du « mumblecore » (mouvance fauchée du jeune cinéma indépendant américain où les dialogues priment sur l’action et une large part est laissée à l’improvisation), Joe Swanberg crée, scénarise et réalise entièrement cette série d’anthologie traitant de la question des compromis de l’âge adulte dans le Chicago d’aujourd’hui. Couple ronronnant décidant de s’ouvrir à d’autres partenaires, surveillance de quartier virant à l’obsession, célibataire en mal d’enfant… Bourrée de petits détails « authentiques », très occupée à faire la nique aux stéréotypes, Easy oublie trop souvent d’avoir quelque chose à dire, mais atteint çà et là quelques micro-sommets de vérité humaine. N.C.

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