Un barrage contre l’Atlantique

Sous ce titre clin d’oeil à Marguerite Duras, l’histrion Beigbeder feuillette ses souvenirs à la faveur d’une retraite/confinement au cap Ferret, langue de terre colonisée par les millionnaires dont les jours sont comptés, montée des eaux oblige. Celui qui se définit comme  » le chaînon manquant entre François Nourissier et Sébastien Tellier » est à la croisée des chemins, plus proche de la fin que du début. De quoi remuer l’écume de la nostalgie, sans se départir toutefois d’un humour cinglant et d’un sens jouissif de l’autodérision. Revenu de ses cabotinages, débarrassé du besoin maladif de plaire, il poursuit ici l’entreprise « autofictive » entamée en 2009 avec Un roman français. Si au départ on redoute l’exercice de style un peu gratuit -son récit empile les phrases courtes-, rapidement ce procédé révèle son efficacité pour exprimer l’essence des sentiments que lui inspirent la séparation de ses parents – » J’avais foi en mes parents et ma foi a été troublée très tôt« -, la découverte des dessins érotiques de Guido Crepax – » Une excitation inconnue: la perversité« -, l’insouciance coupable de sa génération ou le tempérament de pirate de Benoît Bartherotte, son hôte et Don Quichotte de la péninsule qui lutte depuis plus de 30 ans contre son érosion fatidique. Un récital d’aphorismes percutants qui sent bon le sable chaud et la sincérité d’un boomer (é)pris de vertige.

De Frédéric Beigbeder, éditions Grasset, 272 pages.

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