Les Allemands de The Notwist ont beau avoir intitulé leur nouvel album The Devil, you + Me, ils n’ont pas vendu leur âme au diable.

Six ans. Six ans que The Notwist se terrait dans le silence. Six ans qu’on attendait impatiemment la suite de Neon Golden. Disque à la fois pop, électro, atmosphérique, intelligent et mélancolique qui avait assis la notoriété du quartet allemand. Agendas surchargés, course contre la montre… Un petit peu pris par le temps, on cueille Markus Acher et Martin Gretschmann au saut du lit. Du moins au saut du train dès leur arrivée à la gare du midi. Aucune difficulté à reconnaître les deux Allemands à la sortie du TGV. Les deux trentenaires, au look disons nerd, ont le regard à l’affût derrière leurs petites lunettes. Mine de rien, les Notwist fêteront leur vingtième anniversaire l’an prochain. Originaires de la petite ville de Weilheim, près de Munich, ils se la sont joué punk voire métal à leurs débuts (tournant avec Jesus Lizard et Bad Religion) et n’ont viré électro-pop qu’à la fin des années 90.

Quand un groupe la met en veilleuse pendant six ans, on s’interroge forcément. Panne d’inspiration? Déchirements? Perfectionnisme? Fainéantise? « Nous n’avons pas mis six ans pour accoucher de ce disque, précise d’emblée le chanteur, guitariste et fondateur de Notwist Markus Acher. A vrai dire, nous n’y avons consacré que nos deux dernières années. Auparavant, nous avons enregistré avec nos autres projets: Console, Tied and Tickled Trio, Lali Puna, 13 & God… Nous avons aussi énormément tourné. Nous n’avons franchement pas chômé. » L’attirance de Radiohead pour Lali Puna et les déclarations d’amour de Colin Greenwood ont évidemment joué en faveur de The Notwist. « The Notwist est axé sur des chansons. C’est un projet assez expérimental au sein duquel on travaille beaucoup les arrangements, relève Markus. Nous essayons de créer des sons inhabituels pour construire des morceaux indie pop. Lali Puna repose davantage sur l’électronique. Jouant avec les rythmiques et un petit côté monotone et répétitif. Tied and Tickled Trio est plus jazzy. Fonctionne davantage à l’improvisation. Quant à 13 & God, il brasse toutes ces idées et expériences. »

« Console est très instrumental. Le plus ambiant de la galaxie », ajoute Martin Gretschmann. « Nous avons également composé la B.O. de Lichter, complète Markus qui malgré son calme apparent passe tout à coup pour un hyperkinétique. Les musiques de film dépendent de l’implication qu’on te demande et t’accorde. Ce n’était pas le cas cette fois mais quand on t’appelle deux semaines avant que le film doive être terminé, tu as tout compris. »

SYMPATHY FOR THE DEVIL

Au beau milieu de tous leurs fourmillants projets, Markus et Micha Acher, Martin Messerschmid et Martin Gretschmann ont trouvé le temps et l’envie de réveiller la bête. D’enregistrer un sixième album: The Devil, You + Me. « Nous voulions relancer la machine depuis longtemps, concède Markus. Mais 13 & God était une opportunité de collaboration à saisir et recelait, je pense, pas mal d’éléments très Notwist. Travailler avec d’autres musiciens fait du bien. Nous trouvons de nouvelles idées, de nouveaux instruments, de nouvelles manières d’enregistrer. L’une des premières questions à se poser, c’est pourquoi enregistrer un nouveau Notwist et ne pas se consacrer à tel ou tel autre projet. Nous voulions écrire de véritables chansons et nous faire plaisir en expérimentant avec le son, en jouant sur les détails. » On imagine, fantasme les discussions interminables, les débats philosophiques, les prises de tête qui ont dû émailler les sessions… « On fait de la musique ensemble depuis si longtemps qu’on sait comment communiquer et se comporter les uns avec les autres, rassure Markus. Chacun d’entre nous sait que quand il dit un truc ou quand il a une idée qui ne plaît pas, on passe rapidement au-delà. Nous faisons tous tellement de choses, jouons tous tellement d’instruments que nous ne devons pas nous préoccuper de nous assurer une présence sur chaque titre de l’album. L’essentiel, le fil rouge, c’est le résultat. » The Notwist a en tout bossé une bonne vingtaine de morceaux pour les onze qui figurent sur son nouveau disque. « Certains ont rapidement été enterrés. D’autres ont failli se retrouver sur l’album mais ne collaient pas à son ambiance. Nous les utiliserons peut-être comme face B. Ou, qui sait, renaîtront-ils à travers l’un de nos différents projets. »

Intense, soigné, cérébral mais pas trop, The Devil, You + Me parle d’amour, de perte, d’aliénation, de l’alignement des planètes, de la mort et des bons mensonges. Influencés par des groupes comme Autechre et Sonic Youth, comparés à leurs compatriotes de Tarwater, Martin et Markus sont avant tout des curieux aux oreilles avides et avisées. « Pour le moment, j’aime énormément de trucs américains. Genre Animal Collective, Department of Eagles, Grizzly Bear, détaille Markus. J’écoute aussi pas mal d’électronique, de dub-step. J’achète beaucoup de vieux vinyles dans les styles les plus variés. De l’électro expérimentale aux singers/songwriters. Je ne cherche pas les trucs chers, les rarities. Mais disons que je possède une belle petite collection. » Son comparse aime la musique instrumentale, la techno minimaliste, la musique africaine, les chanteurs italiens à l’eau de rose. « Le genre de trucs qui te donne envie de chanter même quand tu ne connais pas les paroles. » Une chose est sûre. Malgré ses 20 ans, The Notwist garde la beauté du diable.

Distribué par City Slang/V2. www.myspace.com/thenotwistnow

RENCONTRE JULIEN BROQUET

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