Trois jours chez ma tante

de Yves Ravey, éditions de Minuit, 192 pages.

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Parti, il y a 20 ans, fonder au Liberia ce qu’il présente comme un internat pour orphelins, notre narrateur (Marcello Martini, ça ne s’invente pas) se voit menacer par sa tante (très fortunée) de la suppression pure et simple de ses généreux mandats postaux mensuels: « Elle avait soi-disant tant de choses à me reprocher. » Revenu au pays, il aura trois jours pour changer le cours des choses auprès de la vieille dame. « Et, sans que je m’y attende, mais alors pas le moins du monde, elle s’est mise à parler, et, je dois le dire, ça a démarré très fort. » Un triangle amoureux, une fille en quête de père, une valise pleine de billets à la frontière suisse, un narrateur sans vergogne, une association de falsificateurs (de signatures et d’émotions): il n’en faut pas plus à Yves Ravey (Un notaire ordinaire) pour bâtir un nouveau petit ballet à la mécanique millimétrée. Sa spécialité: les révélations fracassantes ironiquement placées au détour de didascalies et dialogues anodins. L’effet -jubilatoire- ne se fait pas attendre: le lecteur est aux aguets, attentif aux recoins de chacune des pièces du puzzle. Langue claire et air de ne pas y toucher, ce confrère de Jean Echenoz se joue de ses personnages. Voire de son lecteur. Car arrivé au terme de Trois jours chez ma tante, ce dernier sera bien obligé de reconsidérer les choses: pendant qu’il lisait celui-ci, un autre roman ne s’ourdissait-il pas ailleurs, à son nez et à sa barbe? Lisez Yves Ravey!

Y.P.

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