APRÈS QUATRE ANS D’ABSENCE DISCOGRAPHIQUE, PRINCE REVIENT NON PAS AVEC UN, MAIS BIEN DEUX NOUVEAUX ALBUMS. LA MARMITE FUNK BOUILLONNE ENCORE…
Prince
« Art Official Age »
« Art Official Age »
6
« PlectrumElectrum »
« PlectrumElectrum »
5
DISTRIBUÉS PAR WARNER.
La question du jour: de quand date le dernier album véritablement marquant de Prince? De 1994 (Black Album)? Au mieux… Malgré cela, Roger Nelson a beau avoir laissé à d’autres le soin de révolutionner à leur tour la musique pop, tout se passe comme si son charisme restait intact. Il suffit de voir l’engouement que continuent de susciter ses concerts.
Comment dès lors accueillir non pas un, mais bien deux nouveaux albums? Pour la première fois de sa carrière, le musicien boulimique a laissé passer quatre ans entre deux sorties. Comme si Prince avait décidé de reprendre le taureau par les cornes, après avoir dilué sa « marque » dans des essais parfois fumeux. C’est en effet bien à cela que semblent s’atteler Art Official Age et PlectrumElectrum: à défaut de réinventer la patte Prince, lui redonner de la consistance.
Couinements princiers
Chacun des deux albums s’y prend à sa manière. A charge par exemple du premier cité d’investir la veine funk pure. On connaît les « réticences » de Prince à propos d’Internet. On pourra ainsi lire le titre de l’album de plusieurs manières, Art Official Page, Artificial Age ou encore, comme le suggère plus franchement le premier morceau, Art Official Cage. Où le Web, loin d’être un outil d’émancipation des artistes, serait au contraire une nouvelle manière de les exploiter. A l’image de la pochette, le morceau lui-même est cependant complètement balourd. Plus solide, Clouds redresse la barre. A l’heure où les clichés dénudés des stars se font pirater en direct, Prince chante, accompagné de Lianne La Havas: « In this brand new age we do everything/Quick, fast, in a hurry/All of our life’s a stage/Everybody stars, reality so blurry/ (…) No, we don’t need no clouds »… Breakdown ralentit encore un peu plus le tempo, Prince couinant sur des violons emphatiques. A l’image de Way Back Home, il montre ici qu’il est encore capable de pondre des slows crapuleux, genre le plus réussi du disque.
Le second album du jour a été enregistré avec le nouveau girl band du patron, 3rdeyegirl. PlectrumElectrum illustre la facette plus électrique-guitar hero de Prince. C’est souvent un peu vain (Aintturninround), voire indigeste (Whitecaps), mais jamais non plus assez complètement planté pour nier le fun de l’entreprise. Car c’est bien de cela qu’il s’agit: de plaisir -et ce, même s’il est de plus en plus coupable. Prince s’amuse visiblement, faisant toujours bouillir la tambouille funk comme personne. Repris sur les deux disques, Funknroll en est un bon exemple. Sur sa version Art Official Age, il est même l’une des seules tentatives de « modernisation » -pas de chance, toutefois, elle est ratée…
Comme quoi, il faudra encore patienter pour entendre (éventuellement) un jour la version « 2.0 » du génie princier. En attendant, Prince en 2014, c’est encore un peu toujours une version salon de Purple Rain + 30 ans. L’anniversaire devrait d’ailleurs être marqué par une réédition en bonne et due forme de l’album-clé. Tonight, I’m gonna party like it’s 1984…
LAURENT HOEBRECHTS
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