ET LA LUMIÈRE FUT – PAPE 90’S DES JEUX D’AVENTURE LOUFOQUES, RON GILBERT SORT DE SA GROTTE AVEC THE CAVE. UN PUZZLE GAME CYNIQUE ET ORIGINAL, À EXPLORER LES YEUX FERMÉS.

ÉDITÉ PAR SEGA ET DÉVELOPPÉ PAR DOUBLE FINE PRODUCTIONS, ÂGE: NC, DISPONIBLE EN TÉLÉCHARGEMENT UNIQUEMENT SUR MAC, PC, PLAYSTATION 3 ET XBOX 360.

Ron Gilbert cristallise une génération de joueurs trentenaires oubliée des éditeurs mainstream actuels. Le créateur des deux premiers Monkey Island n’aurait jamais reçu l’aide de Sega sans le come-back des point & click oldschool, dopés par Kickstarter. De quoi pousser le géant nippon à financer The Cave, pour qu’il ne tombe pas aux oubliettes. Travaillant depuis deux ans chez Double Fine Productions avec Tim Schaffer(1), le père de Maniac Mansion recycle ici quelques gimmicks de son jeu fétiche. Comme dans son aventure 80’s pixelisée, le joueur choisit trois personnages parmi sept profils loufoques pour résoudre des énigmes.

La comparaison s’arrête toutefois là. Car Gilbert privilégie cette fois une approche singulière en mode plateforme. Inspiré par le méconnu Lost Viking, The Cave mise ainsi sur une vue de profil en 2,5 D où le joueur prend tour à tour les commandes d’un trio de losers attachants appelés à s’entraider. Le spectre de Day of The Tentacles n’est pas loin. Savante pathétique fan de saucisses, moine bouddhiste improbable, chevalier de paille et autre fermier en manque d’amour possèdent toutefois des pouvoirs uniques débloquant des passages. Ces deux derniers peuvent ainsi respectivement chuter de très haut et retenir leur respiration indéfiniment dans des niveaux qui leur sont dédiés.

Car malgré un huis clos où la grotte (le huitième personnage) lâche des bons mots au joueur, les paysages entre foire hantée, labos idiots et temple tibétain improbable se succèdent. Ron Gilbert en profite d’ailleurs pour piétiner les clichés du jeu vidéo. Avec bonheur. Le niveau réservé au chevalier qui doit sauver une princesse la voit ainsi se faire dévorer par un dragon. Cruauté ultime: le père croit en la victoire du joueur et se félicite d’un mariage imminent. En décalage avec son époque, The Cave n’en est que plus savoureux.

Foire aux questions

D’autant que des marottes hantant Ron Gilbert dans les années 90 guettent au coin du stalactite. A commencer par la phobie des arnaques foraines ou la fascination des attractions touristiques US idiotes que le Sam and Max Hit the Road de Steve Purcell mettait superbement en scène en 1993. Tapissé de décors archéologiques délirants où une soucoupe dort près du Titanic, The Cave demande d’actionner des mécanismes et de transporter des objets pour débloquer des passages. Les protagonistes jonglent donc alternativement avec manivelles, dynamite et autres fusibles.

Le puzzle game livre des énigmes d’une densité d’autant plus stupéfiante que ses commandes de base sont épurées. Seuls un bouton d’action et un de transport d’objets répondent ainsi à l’appel. Labyrinthique, les cavernes explorées demandent cependant un certain temps d’acclimatation. Avec à la clef, des allers-retours parfois désespérants. Aussi trompe-l’oeil que son gameplay à priori simple, le propos léger de The Cave cache en fait les pensées sombres des personnages qu’il met en scène. Platon et son allégorie de la caverne acquiesceraient. A coup sûr.

(1) UN VIEIL AMI DE CODAGE ET UNE AUTRE LÉGENDE DE LUCAS ARTS À QUI L’ON DOIT ENTRE AUTRES FULL THROTTLE ET GRIM FANDANGO.

MICHI-HIRO TAMAÏ

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