On les appelle talking records, speaking records, stand-up records, peu importe: la fonction est la même, donner la parole à la parole. Souvent à fort contenu autobiographique. La sélection qui suit omet des perles – signées William S. Burroughs, Ken Nordine, Andy Kaufman – mais représente néanmoins the real shit…

Allen Ginsberg

Coffret 4CD Poems And Sons 1949 – 1993 (Word Beat/Rhino)

Le père de la street-poésie, des mots scandaleux plein la bouche, gueule ouverte dégueulant les maladies autoritaires de la société américaine d’après-guerre via un torrent de sexe, jazz, obsessions juives et méditation. Ginsberg, c’est l’oncle tutélaire de Dylan, le fantôme gay et vitriolique de l’Oncle Sam dont la langue de vipère croise l’humour (juif aussi) sorti de la génération beat à la Kerouac. Son moment d’anthologie est sur ce coffret, l’étourdissant Howl et ses 25 minutes hallucinées.

Catch phrase: « I saw the best minds of my generation destroyed by madness, starving hysterical naked (…) who cut their wrists three times successively unsuccessfully, gave up and were forced to open antique stores where they thought they were growing old and cried. »

Hunter S. Thompson

Fear And Loathing In Las Vegas (Island, 1996)

Pas réellement un stand-up mais l’adaptation en version radio du bouquin de Thompson paru en 1971: cette virée névrotique et sous haute consommation de drogues dans la ville du péché est racontée par Harry Dean Stanton et Jim Jarmusch dans une tonalité complètement théâtrale. Deux ans avant l’adaptation du délire gonzo au cinéma (avec Johnny Depp), le mauvais trip à Las Vegas trouve sa béatification parlée.

Catch phrase: « Turn up the fucking music, my hearts feels like an alligator. Volume! Clarity! Bass! We must have bass! What’s wrong with us? »

Angela Davis

The Prison Industrial Complex (Alternative Tentacles Records, 2000)

La voix est claire, affirmative, presqu’enjouée mais militante à mort en parlant du « complexe carcéral industriel « : pour Angela, les criminels peuvent être reconnus par leur race, soit « jeune, noir et pauvre ». Activiste essentielle des sixties, militante et (s)ex-symbol, ex-membre du micro-Parti Communiste Américain, Davis est désormais sexagénaire et prof d’université. Elle n’en pas moins conservé son groove verbal et la faculté de mettre dans les mots des questions essentielles. Un trip acide comme si K. Marx avait été femme, noire et américaine. Cela s’appelle la dialectique, non?

Catch phrase: « I grew up with the idea that in order to live in segregated circumstances, Birmingham was the most segregated city in the south, my parents basically taught us that we have to be critical of the way things were, othertwise we couldn’t affirm our own humanity. »

Charles Bukowski

Solid Citizen Live In Hamburg 1978 (Chinaski Records, 2003)

Devant une audience hambourgeoise, l’auteur de Journal d’un vieux dégueulasse propose sa petite boutique des horreurs: obsession alcoolique, gueules de bois à froid, fantasmes corporels (« I’m the fuck machine! »), comme un cendrier trop rempli qui vous pèterait sans honte à la gueule. Le son live est pas terrible (du souffle) mais les mots plongés dans le goudron (puis les plumes) sont bien là, crus et vivants, et Charles révèle en public ce qui fait son prix: un quota d’humanité. Dépravé? Le terme semble un peu faible…

Catch phrase: « What’s this thing? Dead bodies you’re kidding? No, look around (…) Harry found one in the kitchen, one in the closet and then one in the tub. »

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