STUFF., le jazz qui groove

Joris Caluwaerts: "Parfois, on se demande ce que foutent les mecs derrière leur laptop. Nous, nous jouons de vrais instruments et ne nous cachons pas derrière l'électronique." © Alexandre Popelier
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Cousin belge, et donc forcément un peu surréaliste, de BadBadNotGood, STUFF. fait groover et modernise le jazz entre hip-hop et musiques électroniques.

Anvers. Une chaude matinée de mai. Une petite rue tranquille proche des quartiers populaires. STUFF. reçoit dans son antre, le Studio Finster. Et pour le coup, le claviériste Joris Caluwaerts, qui habite juste au-dessus, joue les concierges. « C’est encore en construction. Mais on avance petit à petit. Pièce par pièce. On cherchait un endroit où répéter quand j’ai acheté. On a presque tout fait nous-mêmes avec mon père… On a aménagé cet espace pour nous mais j’y ai produit de petites choses comme Hydrogen Sea. DAAU a enregistré un disque ici. Puis Mauro aussi. Celui en néerlandais, sous le nom de Maurits Pauwels. Cet été, ce sera au tour de Roland. »

En attendant son collègue bassiste Dries Laheye, Joris fait faire le tour du propriétaire. Dans le studio principal, au fond du garage, encore décoré par les vestiges d’un vieux réveillon de Nouvel An, on se croirait dans un musée de claviers et de pianos. À l’étage, une cuisine, une grande terrasse et une deuxième salle des machines… « Tu veux un café? Un verre d’eau? » Le frigo est presque vide mais STUFF. est à la maison. Quelques CD et vinyles, dont la compilation reggae Coxon’s Music de Soul Jazz, traînent à côté des platines. Old Dreams New Planets, le deuxième STUFF., a été fabriqué ici. « Sur invitation de DeSingel, on a fait une tournée des théâtres l’année passée, retrace Dries. On avait pu travailler là-bas pendant trois semaines en janvier 2016. On avait dû imaginer de nouvelles compositions pour un public assis. On avait utilisé des textes de Josse De Pauw. Il n’était pas sur scène avec nous mais il avait enregistré des voix. »

« Le premier plan pour l’album était d’enregistrer ces idées, de voir ce qui était utilisable, ce qu’on voulait éventuellement garder. Et ce dont on pensait plutôt se débarrasser, approfondit Joris. Après, on a fonctionné comme avec le premier. De nouvelles choses et puis pas mal d’improvisation en studio. Il y a toujours eu une grande différence entre nos albums et nos live. Et on veut qu’il en aille encore ainsi. C’est une expérience différente, un autre médium… »

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Malgré l’absence de voix, cette empreinte sonore qui rend la plupart des groupes reconnaissables, STUFF. était parvenu à se forger une identité et à toucher un large public avec son premier album. Il s’est à nouveau, pour le deuxième, gardé d’embaucher des chanteurs… « C’est toujours une lutte pour nous. Mais c’est assez compliqué si tu n’en utilises que sur un ou deux morceaux, expliquent-ils ensemble. Ça nous plaît de laisser la musique ouverte. D’offrir à l’auditeur la possibilité de rêver, de fantasmer. On n’est pas très bons avec les paroles. On a déjà du mal avec les titres des chansons… (rires) Puis, on est un groupe instrumental. C’est assez facile. C’est notre manière de communiquer et on est encore en train de l’explorer. Pour l’instant, la musique est déjà si dense, tellement de petites choses se passent, que ça ferait beaucoup à la fois. Quand on utilisera des voix, on commencera sans doute la construction des morceaux par là… Après on verra, ça pourrait tout aussi bien être un rappeur qu’autre chose. Un David Byrne par exemple nous fait rêver… Ça arrivera quand ça fera sens pour tous les membres du groupe. Ça viendra de la volonté de créer quelque chose. Pas d’une suggestion de label ou de manager. En gros de l’art et pas du business… »

Intersections

Old Dreams New Planets. L’image est jolie… Ne rejette pas le passé. Embrasse l’avenir. Comme la pochette de l’artiste franco-marocaine Yto Barrada, tout en couches et couleurs (« elle mène un travail très intéressant et politique mais on ne l’a pas choisie pour ça »), le titre du disque colle parfaitement à l’univers de STUFF. « On a d’abord pensé à cette planète Proxima b découverte l’an dernier. Sept autres l’ont été depuis. Des planètes qui pourraient devenir une seconde maison pour les habitants de la Terre parce qu’elles possèdent des qualités similaires. Et ce même si elles en sont très éloignées. C’était l’idée romantique d’un nouveau départ. Un peu naïve aussi. Non, on n’a pas encore notre ticket pour la Lune. Mais on aimerait bien composer la musique pour le trajet… »

Chez STUFF., tout se fait à l’unanimité. Et on se dit que les décisions ne doivent pas toujours être évidentes à prendre à en juger par leurs fortes personnalités et leur sens de la nuance. « On a tous étudié le jazz, résume Dries. Joris a plutôt un background pop rock. Moi aussi. Mais en un peu plus hip-hop et production de beats… Andrew vient de l’électronique. Lander est branché jazz et beats. Et Menno disons plutôt rap et soul. Mais tout ces univers s’élargissent et s’entrechoquent. C’est éclectique. Je pense que ça s’entend. C’est bon la discussion et le débat d’idées. Tu finis par trouver l’intersection et c’est ce qui rend ton son unique. »

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Et celui de STUFF. l’est assurément. Même si on se dit qu’il aurait pu signer la BO de Drive et qu’un titre comme Strata a par moments un petit côté Air… « Comme Flying Lotus, le vieux jazz, Herbie Hancock, Shuggie Otis ou Aphex Twin, l’un des groupes sur lesquels on est tous d’accord », concède Dries. « J’ai même cherché quels synthés ils utilisaient, avoue Joris. Je les ai vus deux fois en concert. Notamment aux Ardentes où on avait joué avant eux. Je les avais vus installer tout leur matos. J’étais émerveillé. » Si l’album a à nouveau été masterisé par Daddy Kev (« c’est lui qui gère tous les Brainfeeder; on aime son son, sa vibe« ), Joris et Andrew se sont pour le coup chargés de son mixage… « On a compris qu’il ne fallait pas solliciter quelqu’un d’autre, achève Joris. Cinq avis, c’est déjà pas mal. Après, ça devient trop confus et prise de tête pour nous. Quand tu confies ta construction à quelqu’un d’autre, il ne sait pas pourquoi les choses sont à telle ou telle place et il démolit ce à quoi tu as passé des heures et des jours de travail. On a une opinion déjà si forte et précise que c’est presque impossible à gérer… »

OLD DREAMS NEW PLANETS, DISTRIBUÉ PAR SDBAN ULTRA/NEWS. ***(*)

LE 13/07 AU GENT JAZZ ET LE 18/08 AU PUKKELPOP.

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