Ronquières J1: ça ratisse large…

Metronomy © Eléonore Verleyen

Peter Doherty, Joey Starr et Metronomy chantent le long du canal Bruxelles-Charleroi. On dirait le début d’une blague. Ajoutez à l’équation Stéphane Pauwels en animateur à la sauvette: bienvenue à la 1re édition du Ronquières Festival!

« It’s very cool to be with you in front of this bizarre structure » lance Joseph Mount, chanteur et tête pensante de Metronomy, se référant au fameux plan incliné de Ronquières. Il faut dire que, si on avait déjà vu des concerts sur une péniche, un festival devant un ascenseur à bateaux, c’est plutôt inhabituel.

Et quoi de mieux pour plonger dans ce cadre naval que le rap aquatique d’Hippocampe fou? Un rap old school qui semble venu tout droit du futur. Un trip complètement Hue! Hue! dadaïste emmené par ce canasson des mers. Attifé d’un bonnet de bain à fleurs, Hippocampe manie la langue de Molière comme Bruce Lee son nunchaku. Il nous balance son rap festif avec l’aide d’un MC en demi-tenue de plongée. Surréaliste, dansant et excentrique. Les lascars préfèrent « faire un succès d’estime, que faire l’équivalent en rap de Bienvenue chez les Ch’tis. » Rien que pour ça on adhère.

English Riviera vs Plan incliné de Ronquières

Il n’est pas encore passé 16h. Et comme à Ronquières, la programmation a ses raisons que la raison ignore, on retrouve déjà les Anglais de Metronomy. On apprendra par la suite qu’ils avaient un avion à prendre pour un concert le soir-même. Ceci explique cela. C’est donc sous un grand soleil qu’on profite de leur pop electro radieuse. Le site de Ronquières prend des allures d’English Riviera. Ca sent bon l’été, la plage et la crème solaire. Finalement, ce Metronomy en plein après-midi se laisse apprécier pleinement. Difficile de résister.

Short de circonstance, guitare aux couleurs exotiques et lunettes à la Polnareff, Vincent Lontie des Bikinians nous ramène de l’autre côté de l’Océan. La Californie, le sable, le soleil et les filles. Hystericool, nous rappelle furieusement les guitares débridées de Link Wray, Dick Dale ou des Ventures. Sur d’autres morceaux, on retrouve le bon son crasseux du rock psyché de la fin des sixties. Un style nerveux et bien trempé, qui ne parviendra pourtant pas à dérouiller totalement un public plutôt mou, qui se montrera plus enclin à remuer sur les rythmes binaires de Soldout.

Steph Pauwels en roue libre

Entre chaque concert, c’est Stéphane Pauwels qui se colle à la présentation. Demander à « Steph » de parler musique, c’est un peu comme de demander à Pete Doherty d’avoir un avis éclairé sur l’avenir de la division 3 belge. Présentateur en roue libre, il nous apprendra ainsi que Soldout, c’est de l’electro, mais que c’est aussi ce qu’on dit d’un concert dont toutes les places sont écoulées. On remercie Stéphane pour sa science, non contents de le voir céder sa place au groupe en question. Invités en dernière minute, suite à l’annulation de Skip the Use, David et Charlotte viennent présenter leur nouvel album. La recette n’a pas beaucoup changé. On n’est pas transporté mais ça reste plaisant et efficace. On se dit quand-même que ça aurait eu plus de gueule si les jeux de lumière n’étaient pas anéantis par un soleil encore flamboyant.

Fin du suspense

Est-ce que Peter Doherty viendra, et dans quel état? La question qui était sur toutes les bouches. Hippocampe fou soulevait aussi la judicieuse question de la prononciation dohertienne de « Ronquières ». On ne le saura jamais, parce que Peter n’est pas vraiment du genre communicatif avec son public. Son concert débute avec l’impression désagréable d’assister à un freak show. Un monstre qu’on exhiberait et dont chacun attend le premier faux pas. Curiosité malsaine (mais tellement humaine) qui s’estompera assez vite. Parce que, malgré le teint cadavérique, Peter gère. Le bougre sait y faire avec sa guitare. Seul sur scène (si on fait abstraction de la présence totalement dispensable de deux ballerines), il enchaînera les morceaux sans transition. Des morceaux de sa carrière solo, mais aussi des classiques des Libertines et des Babyshambles. Pas besoin de plus que Peter et sa guitare pour reproduire toute l’énergie dévastatrice de morceaux comme Fuck Forever ou Can’t Stand Me Now. Par contre, les morceaux de son répertoire personnel, aussi savoureux soient-ils, se prêtent mal à l’exercice du festival. En showcase ou dans une salle confinée, ça aurait été parfait. Là, c’est sans doute un peu trop calme pour un public qui ne demande qu’à bouger. Un job taillé sur mesure pour Caravan Palace.

It don’t mean a thing if…

Du swing revisité à la sauce electro, c’est ce que propose Caravan Palace. « It don’t mean a thing if it ain’t got that swing » disait Duke Ellington. Les Français parviennent à nous ramener à cette époque où le jazz était encore cette musique qui faisait danser les masses, et pas ce qui est considéré aujourd’hui par beaucoup comme une musique un peu chiante pour intellectuels. Femme brune, sensuelle et un peu aguicheuse, Zoé la chanteuse a tout d’une Betty Boop des temps modernes. Ca scate, ça danse le lindy hop, ça sent le craquement de 78 tours et la moiteur des vieux ballrooms. Le groupe s’éclate et éclate son public.

Pour sa première édition, le festival ratisse large. Tellement large que même Simon Monceau (Ca va se savoir, souvenez-vous…) aurait bien de la peine à trouver un fil rouge entre les différentes prestations. Mais pour qui n’est pas trop dérouté par le nonsense de l’affiche, il y avait de quoi se délecter pour cette première journée du Ronquières Festival.

Valentine François (stg)

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