Qui est Pourbaix?

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Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

Performeur percutant, Robin Pourbaix a fait de la question de l’identité une obsession. Il épaissit le mystère le temps d’une nouvelle exposition.

Showroom Robin Pourbaix

Exposition collective, Hôte Gallery, 203 rue Haute, à 1000 Bruxelles. Jusqu’au 21/05.

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Passionnant parcours que celui de Robin Pourbaix (1971). à la fois musicien, danseur et plasticien, ce Binchois vivant entre Bruxelles et Charleroi a décidé de fondre toutes ces facettes en une pratique, la performance, qu’il a initiée en 1998 par le biais d’un avatar extravagant, Robin Pink. Plusieurs lignes de force traversent son oeuvre. L’une d’entre elles est assurément la « décontextualisation ». Comme l’a pointé la critique d’art Sandra Caltagirone, qui fait partie de l’exposition, ce déplacement des contextes est son « modus operandi ». On a ainsi pu le voir mendier dans un avion ou amener l’intimité -la nudité, par exemple- à des endroits où on ne l’attendait pas. On pense aussi à la performance qui l’a conduit à vendre des caricoles à Marrakech. Un autre des axes déterminants de la pratique de Pourbaix est la question de l’identité. Il l’a écrit par ailleurs: « Dans ces temps où tout le monde désire « être », je m’emploie à ne pas être afin de préserver l’immensité de l’espace de jeu. » De fait, l’intéressé n’a de cesse de se reproduire à l’infini, ne serait-ce qu’au travers de masques qu’il répand comme la bonne parole. Chaque nouvelle incarnation par un tiers dilue un peu plus sa réalité propre. Pas étonnant dès lors qu’il lui arrive de se représenter sous la forme d’un costume vide. Au fil du temps, le visage de Pourbaix a quitté le socle de l’individualité pour devenir un label, une marque. Il y a quatre ans, l’artiste s’est lancé dans une réactivation particulière de cette question identitaire. Pour ce faire, il a sollicité par mail une cinquantaine d’artistes dont il aimait le travail. Pascal Bernier, Mehdi-Georges Lahlou, Yves Lecomte, Jean-François Octave, le collectif VOID… La demande? Leur proposer d’utiliser son image « à l’insu de son plein gré ». Cette initiative qui aboutit aujourd’hui à une monographie et un accrochage n’est pas anodine: elle lui a permis de jouer tout à la fois au curateur et au galeriste.

Confusion

Si le but ultime de la sollicitation du performeur se découvre sous la forme d' »un livre d’art dont il est le curateur« , l’exposition Showroom Robin Pourbaix en est la prolongation naturelle, une sorte de « produit dérivé » si l’on considère qu’il existe un marketing Pourbaix. Une partie des travaux qui ont été imaginés par les artistes approchés -seuls cinq ont refusé l’invitation- se découvrent comme autant de regards multipliant à l’infini la complexité du personnage. à l’intérieur règne une passionnante confusion qui éveille le visiteur à la façon d’un jeu de piste: il est quasi impossible de savoir qui se cache derrière l’oeuvre admirée. Comme le dit l’artiste: « L’investissement a été tel qu’au final je me retrouve avec des pièces que j’aurais pu réaliser moi-même, c’est troublant. » Seules certaines signatures se distinguent nettement en raison du caractère marqué de leur univers, ainsi d’un Jean-Luc Moerman ou d’une Léopoldine Roux. En revanche, impossible de pointer un Stephan Balleux qui s’est offert une parenthèse en livrant une magnétique photographie numérique sur le sujet. Le reste? Des mots, des images en mouvement, des toiles et des objets réappropriés, autant de propositions qui font se perdre un peu plus dans un labyrinthe nommé Robin Pourbaix… dont on a envie de préserver l’intensité. Mais au final, la question « qui est-il? » génère plus que jamais la réponse « toutes, tous, aucun et aucune« .

www.hotegallery.com

Michel Verlinden

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