Simian Mobile Disco, beat hédoniste

Simian Mobile Disco © DR
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Ce vendredi, le Libertine Supersport accueille le duo Simian Mobile Disco. L’occasion de tailler un brin de causette avec les auteurs de l’un des albums électro les plus jouissifs de 2012.

Flashback. Il y a un an à peine, le Libertine Supersport, enseigne capitale du clubbing bruxellois, mettait un genou à terre, obligé de quitter le K-nal qui l’abritait depuis 2009. Douze mois plus tard, le LS a bien rebondi, fixé désormais au Mirano. Petit événement: le 8 février, il accueillera Simian Mobile Disco. En 2010, le duo anglais était déjà passé par là. Jas Shaw: « Dans chaque ville, il y a toujours un ou deux clubs qui essaient de résister, en ne bookant pas en fonction des entrées que la soirée pourrait faire, mais selon leurs envies, un peu comme un bon patron de label. Le LS remplit ce rôle-là. »

L’an dernier, SMD sortait avec Unpatterns, l’un des albums électroniques les plus jouissifs de 2012. Irrésistiblement dansant, à la fois sombre et sexy. Jusqu’ici, le duo ne l’avait pourtant décliné en live qu’en de rares occasions. Une raison de plus de se pointer au L/S.

Sur cette mini-tournée, vous jouez exclusivement en club plutôt que dans des salles de concert « traditionnelles ». Pourquoi?

Simplement parce que c’est là que vit la musique qui nous attire le plus. À la base, les morceaux que nous composons ne sont pas destinés à des foules statiques. Dans les salles rock, il existe toute une série de codes, presque un format: les gens sont au bar, se bougent pour voir la 1re partie, puis retournent boire un verre, la salle se vide, jusqu’au concert principal, qui doit se terminer à telle heure, blabla… On aime aussi ce genre d’endroit, mais c’est plus compliqué d’y imprimer sa patte, de s’y immerger. En club, c’est différent. Il y règne une dimension presque de communion. Exemple: il n’y a que peu de hiérarchie entre les différents artistes de l’affiche. À la limite, le DJ le plus connu jouera assez tôt dans la soirée… Donc on a repéré les soirées intéressantes un peu partout et on a monté une tournée autour de ça. Du coup, le planning est un peu plus fragmenté, mais cela fait sens. On joue vraiment là où l’on a envie.

Malgré tout, reste l’impression qu’une tournée des salles continue à avoir plus de résonance au niveau promo. Un peu comme la sortie d’un album d’ailleurs, qui a toujours plus d’impact dans la presse que la sortie d’un nouveau single ou EP, non?

Je suis bien d’accord. De plus en plus, les musiciens passent par le single. Il y a des bonnes raisons à ça, et cartonner avec un titre permet malgré tout d’ouvrir énormément de portes. Mais l’album reste un truc à faire, ne serait-ce que d’un point de vue peut-être plus égoïste. C’est une autre énergie, tous les musiciens électroniques qui s’y sont attelé le diront. Comme avec un single, vous essayez aussi de capter les gens, mais par la force des choses, le format long vous amène à essayer des trucs plus bizarres. D’un point de vue artistique, c’est un bon défi.

Unpatterns, votre dernier album, est-il facile à retranscrire live?

Pas du tout. Disons que cela a été très compliqué d’apprendre à l’exécuter en direct. Comme c’est de plus en plus le cas avec notre musique, la réalisation du disque a impliqué pas mal de sequencers, de synthés analogiques… On bidouillait et si cela sonnait bien, on enregistrait, sur le moment même, en cherchant toujours l’inattendu, l’imprévu. À la fin de la journée, on réécoutait le tout. Mais on n’avait plus toujours une idée claire de comment on était tombé dessus: avec quel input? quel synthé?… Du coup, il a fallu replonger dans les morceaux, un peu comme si on reprenait ceux de quelqu’un d’autre. Ce qui est plutôt agréable en fait.

Pourquoi les musiques électroniques vous excitent-elles toujours autant?

J’ai l’impression que la scène n’a jamais été aussi remuante. Cela tient presque à l’esthétique-même des musiques électroniques: vous essayez toujours de sortir quelque chose qui ne sonne comme rien d’autre. Il y un truc intrinsèquement futuriste, le mot optimisme est peut-être fort, mais en tout cas une tendance au changement, à trouver de nouveaux sons. Cela existe évidemment dans toutes les musiques. Mais dans l’électronique, l’idée de sortir un disque « classique », par exemple, reste toujours moins intéressante que celle de faire un disque intéressant.

La dance n’a jamais été aussi populaire. Un danger ou une chance?

C’est clairement à double tranchant. Généralement, le signal de ce genre « mainstreamisation » est quand vous intégrez le champ de la pop, que les producteurs commencent à intégrer vos « ficelles ». Ce qui peut donner parfois -pas toujours- des trucs vraiment horribles. Malheureusement, c’est aussi ce qui est le plus connu et met le reste un peu dans l’ombre. Mais vous savez, on a déjà vu cette musique devenir populaire, puis disparaître plusieurs fois. Les gens qui sont vraiment dedans s’en foutent! Que les charts suivent ou pas, je m’en fous. Je n’écoute jamais les radios mainstream. Les lieux où les gens viennent vraiment écouter la musique et pas ramasser des filles, ne changent pas. Ils ne sont pas affectés par ce genre de mouvement. Nous, en tout cas, on s’en fout de ce qui marche ou pas. Le pire que vous puissiez faire est de chasser derrière ce qui semble hot. Vous raterez toujours votre cible.

Quels sont vos plans pour 2013? De nouvelles sorties dans votre « collection » Delicacies?

Absolument! Après la tournée, on devrait s’y remettre et bosser sur une série de sorties. Un album, c’est vraiment un gros boulot. Pondre un maxi est tellement plus simple! Cela ne demande pas autant de réflexion, c’est plus souple. On peut se permettre aussi davantage d’expérimentations. Des collaborations sont également dans l’air. Pas forcément des vocalistes, mais plutôt d’autres producteurs qui devraient nous rejoindre en studio pour chipoter un peu sur nos sons.

Libertine Supersport, le 8/02, au Ciné Mirano, 1210 Bruxelles. www.libertinesupersport.be

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