Rock Werchter J4: La théorie des genres

Christine and the Queens © Olivier Donnet
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Rock-soul sudiste d’un côté, électropop frenchie de l’autre: les queens de Werchter ce dimanche, c’étaient Alabama Shakes et Christine and the Queens.

C’était l’un des concerts les plus attendus du festival. Le premier coup de fièvre pressenti dans un début de dimanche pas toujours folichon. Sur le coup de 18h, Alabama Shakes devait mettre le feu aux poudres. Un quart d’heure avant le début du concert, le Barn est d’ailleurs déjà plein à craquer. Après une intro piquée à Dr Dre (The Recipe), Future People est la première cartouche tirée par les Sudistes, et déjà Brittany Howard rue dans les brancards. Premier couinement, premier frisson. La front woman est plus déchaînée que jamais. Rise To The Sun confirme, avec son crescendo imparable. Après le triomphe de leur premier album, Alabama Shakes aurait pu perdre le fil. Au lieu de ça, le récent Sound & Color a montré au contraire que le groupe avait gagné une nouvelle confiance, à l’image justement de Howard, qui lâche les derniers freins. Elle hurle, postillonne, serre les poings, jamais très loin de la supplique gospel. Avec toute la théâtralisation qui va avec. Chez la plupart des chanteuses, cela passerait même pour too much, au bord de la grimace. Chez Howard, pas: suant à grosses gouttes, elle semble ne rien calculer, mais au contraire tout donner, tout le temps.

Alabama Shakes
Alabama Shakes© Olivier Donnet

Dans la foulée, Christine & The Queens se retrouvait elle programmée sur la scène du Klub voisin. La transition entre les deux univers n’était pas forcément évidente: rock-soul sudiste d’un côté, électropop frenchie de l’autre. Hargne très masculine sur robe à fleur pour Howard, déhanchement sur veston d’homme pour Christine. La théorie des genres, qu’ils disaient. Question musique, celui de la Française balance par exemple entre Christophe et Kanye West (sa reprise des Paradis perdus mixés à Heartless), Véronique Sanson et Michael Jackson. Un grand écart qui lui a permis de faire un malheur non seulement chez elle, mais aussi à l’internationale. Ou en tout cas en Flandre, poussée par la toute-puissante Studio Brussel. Pour surprenante qu’elle puisse paraître, sa place dans l’affiche de Werchter n’était donc pas usurpée. Pour l’occasion, le show a pris encore un peu plus de corps. Sans grand tralala (sur scène, deux stations synthé-boite à rythmes, un guitariste-bassiste-choriste, quatre danseurs, et c’est tout), mais avec des effets aussi simples que maîtrisés (le jeu des noirs et blancs), et des chorés déliées qui retombent toujours sur leurs pattes. Comme la prêtresse d’Alabama Shakes, la Française semble par moment avoir un peu trop regardé les films de Jim Carrey. Mais en jouant encore avec les citations (Mark Ronson, ou le Pump Up The Jam de Technotronic), et ne lâchant jamais son sourire, la Française pop aura réussi à emballer tout son petit monde.

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