Pukkelpop J1: Soleil noir

Jurassic 5 © Olivier Bourgi
Kevin Dochain
Kevin Dochain Journaliste focusvif.be

Le rockeur soul Curtis Harding, le « screaming eagle » Charles Bradley, les dinosaures du hip hop Jurassic 5, ou encore Michael Kiwanuka et Lianne La Havas. Black Power sous le soleil.

A priori, on pensait qu’il aurait été bien, Curtis Harding, sous la Marquee juste avant Charles Bradley. Mais à le voir au Club, en cette fin d’après-midi, on se dit qu’il aurait eu l’air un peu con. Parce que le mec du Michigan, élevé par une mère évangéliste qui l’a accompagné dans un groupe gospel lui et ses trois soeurs, a sur scène la soul plus rock que sur disque. Guitare, basse, batterie. Ni cuivres ni claviers. C’est bien foutu mais aussi terriblement plat. Ses Ain’t No Sunshine de Bill Withers et California Dreamin’ des Mamas & The Papas n’y changent pas grand-chose. Curtis, 35 balais, ancien choriste de Cee-Lo Green, a l’air de s’emmerder solide. Et ça tombe bien: nous aussi.

Tout le contraire du prince Charles. Le visage perlé de sueur, le sieur Bradley, 66 piges au compteur, squette les braguettes et fait chavirer les coeurs. Rappelant que le label new-yorkais Daptone domine, et outrageusement ceci dit, le grand revival soul. Tout de bleu, puis de noir, vêtu, le Screaming Eagle déploie ses ailes. Nous gratifie des pas de danse dont il est coutumier. Et surtout renverse de sa voix à tomber. Derrière, la musique de ses Extraordinaires (deux guitares, une basse, une batterie, un clavier, un sax et une trompette) fait le reste. The World is Going Up in Flames, You Put The Flame on It… Chaud chaud chaud.

Ce jeudi après-midi était donc bel et bien décliné en mode black power. Ce ne sont pas les festivaliers qui étaient amassés devant la Main stage pour Jurassic 5 qui affirmeront le contraire. Si, à vrai dire, on ne savait pas trop à quoi s’attendre de la part de ces presque dinosaures du hip hop (le groupe a plus de vingt ans), les 4 MC et 2 beatmakers ne s’y sont pas pris avec le dos de la cuiller pour mettre la pâtée à une plaine qui ne demandait que ça. On n’est jamais loin du hip hop old school (la sortie prochaine du film Straight Outta Compton sur les N.W.A. est tout à fait à propos), et les flows s’enchaînent et se superposent avec un groove et une niaque communicative qui font plaisir à voir comme à entendre. On n’est d’ailleurs toujours pas remis du « solo » de DJ Nu-Mark et Cut Chemist, affichant chacun une collection de « platines-guitares » maison (oui, on parle bien de platines portées comme des guitares, à la manière des synthés-guitares qui ont fleuri dans les 80’s). Ho-oooooh!

Plus tard, du côté de la Marquee, c’est Michael Kiwanuka qui prouvait que la BBC n’a pas tout a fait eu tort de le désigner Sound of 2012. Trois ans plus tard, le gaillard a usé sur scène son premier album, Home Again, porté par son single éponyme et plein de soul, et s’apprête à sortir une deuxième plaque. Qui s’annonce prometteuse, à en croire les bribes qu’on a entendu aujourd’hui, portées par un band qui tenait particulièrement la route. À noter que tout le concert durant, Kiwanuka a tenu en haleine un fan de marque, en la personne de Seasick Steve, assis au premier rang, à qui il a dédié sa gueule de bois et le morceau qui allait avec. Ce n’est pourtant pas aux vieux singes qu’on apprend à faire des grimaces…

Comme pour parachever ce cycle 100% Black avant l’arrivée des têtes d’affiche white trash (Limp Bizkit et Linkin Park, hum…), la fraîche Lianne La Havas jouera les meneuses de girl group phil spectoriens sous la tente du Club. C’est enjoué, c’est immédiat, c’est souriant, seul problème: ses morceaux sont aussi lisses que sa coiffure -par ailleurs splendide- dont pas un épi ne sort. Pour peu, on aurait par moments pourtant pu croire avoir une Beyoncé en devenir devant nous…

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