Nuit belge, nuit de l’éclectisme, nuit de la frustration

Nuit belge, Chapiteau, le 16 mai 2016 © Olivier Donnet
Kevin Dochain
Kevin Dochain Journaliste focusvif.be

Lundi aux Nuits Botanique, les formations du cru s’enchaînaient et se chevauchaient. Les choix cornéliens en perspective ne nous ont pas pour autant empêché de voir des fragments de concerts de 7 des 11 groupes programmés. Comptes-rendus express.

Le concept est toujours aussi génial que frustrant: au cours de la Nuit belge des Nuits Bota, les concerts sont programmés en mode séance de rattrapage. Sur les quatre scènes ouvertes, soit le Chapiteau, l’Orangerie, la Rotonde et le Grand salon, les groupes s’enchaînent, se chevauchent et ne se ressemblent pas. Et pour peu qu’on ait envie de varier les plaisirs, la soirée prendra des airs de marathon: on n’aura d’ailleurs vu aucun groupe plus de 25 minutes ce lundi.

Ouverture avec Bots Conspiracy, inconnu au bataillon jusqu’ici, mais dont les promesses de « MC robot » nous ont donné envie de venir tôt pour en juger sur pièce. Verdict: sympa 5 minutes, le concept se mord par contre vite la queue. Soit une espèce de Terminator monté sur une caisse, en playback sur le rap/indus balancé dans les enceintes. En coulisse, un DJ/marionnettiste et un ingé light se chargent d’animer un tant soit peu la scène. Mais si ça manque de relief et d’humain (ben tiens), il faut bien avouer qu’on n’a pas fait plus efficace depuis l’invention du DJ-set clé USB…

On captera ensuite quelques notes du Colisée qui a prévu une grosse fête au Grand salon, avec des invités à la pelle: François de Frànçois and the Atlas Mountains, Témé Tan et Walter Hus seront de la partie d’un show fun et décomplexé, même si on se sent parfois un peu largué durant les passages les plus barrés.

Retour au Chapiteau et changement radical de style: Oathbreaker ne fait pas dans la dentelle. Mêlant post-hardcore, métal et shoegaze, les Gantois rappellent de temps à autre Deafheaven ou Converge, avec lesquels ils partagent d’ailleurs l’affiliation au label Deathwish Inc. Super direct, passant d’ouragans sonores à des passages aériens sur des morceaux s’étalant souvent au-delà des 10 minutes, Oathbreaker sera sans aucun doute notre découverte de la soirée. Dans ta face.

La Rotonde étant pleine à craquer pour Victoria+Jean (la file s’étend devant l’entrée), on devra faire l’impasse et se consoler avec le groove contagieux de Pomrad, qui manie le synthé-guitare comme personne. Voix vocodée et sonorités eighties assumées, hyper dansant, c’est souvent très évocateur du Daft Punk période Discovery. Bien ou bien?

Vient ensuite le gros morceau de la soirée: La Muerte. Avec sous le bras un nouveau EP 20 ans plus tard (qu’on vous proposait en découverte il y a peu), le quintet a encore prouvé qu’il en avait dans le futal. Et même s’il se dit en coulisse que Mark Lagoon a reformé le groupe pour financer son film à venir, ça n’en est pas moins plein de générosité. Qu’est-ce que ça gueule, suinte, crache, transpire, avec ces guitares plein pot et ce chant écorché vif… Et ce ne sont pas les invités (Vive la Fête sur Je suis le destructeur et Front 242 pour Headhunter) qui amèneront du répit au concert qui dégueule plein pot. Alors va!

Baloji
Baloji© Lara Herbinia

Le changement d’ambiance sera à nouveau radical quand il s’agira d’enchaîner avec le concert de Baloji toujours accompagné de son Orchestre de la Katuba. Kinshasa succursale et 64 bits and Malachite serviront de fil rouge au concert en mode festif « mais pas world music. C’est la musique de chez nous », comme le soutient l’ex-Starflam. Tout cela est tellement upbeat et ensoleillé qu’il en décrochera même un début de sourire à Bertrand Cantat, dans le public à nos côtés (pas étonnant qu’il soit dans les parages: il jouera ce soir au Cirque Royal en compagnie de Pascal Humbert pour la BO live des Premiers, les derniers de Bouli Lanners).

Un cours de lingala et de swahili plus tard, nous voilà dans la Rotonde, à nouveau pleine à craquer, pour clôturer la soirée en compagnie de quelques morceaux de Robbing Millions. Belle bande de musiciens geeks, les mecs prennent un malin plaisir à torturer leur pop à grand renfort de plans jazzy et de structures rythmiques improbables. Du genre à te faire balancer la tête dans un sens et le corps dans l’autre… Le final, avec un Dinosaur que le public conquis reprendra en choeur, achèvera de nous convaincre qu’il faut suivre ces gars-là de près.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content