Monologue d’été (1/4): DJ’s partout, droits d’auteur nulle part!

Un goût de Tomorrowland au centre de vaccination d'Anvers © BELGA PHOTO NICOLAS MAETERLINCK
Serge Coosemans
Serge Coosemans Chroniqueur

Ambiance estivale et chronique en short, en mode « conversation pépouze et un peu décousue autour de deux saucisses et de trois bières » (même si c’est la fin du monde), pour ce Crash-Test S06E42. Au menu: ambianceurs de centre de vaccination et policiers sous « licence DJ ».

DJ de centre de vaccination!?! Non mais t’imagines, ils foutent maintenant des DJ’s dans les centres de vaccination, soi-disant pour faire venir les jeunes. Je me demande d’ailleurs combien ces types sont payés, tiens. Et ce qu’ils jouent, surtout. Moi, bien sûr, je ne taperais que du Coil, le pire de Nine Inch Nails et Throbbing Gristle. De la musique qui fout bien mal à l’aise quand tu passes ton petit quart d’heure sur ta chaise en plastoc à espérer ne pas avoir de choc anaphylactique. Boum, un coup de stroboscope, boum, Zyklon B Zombie tout à fond, et boum, voir verdir les visages. Si ça ne marche pas les DJ’s, ils essayeront quoi, d’ailleurs? Des strip-teases? Un pack d’Orval? Un poké avec Lukaku? Non mais t’imagines, t’as 20 ans en 2020, tu veux devenir DJ et paf, en moins d’un an, tout ferme, le vinyle passe de 20 à 50 balles et le seul job qui se présente à toi, c’est de passer de la musique populaire devant des gens assis qui se tiennent le bras en espérant ne pas crever dans le quart d’heure. Déjà que mourir du vaccin après avoir survécu à une pandémie est ridicule mais quelle horreur si en plus, tu meurs sur du Madonna… Et le CV du DJ, purée… Même mixer à l’oeil sur Jam tient moins de la hchouma. Y a pas plus miteux, sauf peut-être jouer un edit du Imagine de John Lennon dans une gare après un attentat. Ou apprendre aux flics à caler un beat, tiens…

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DJ de commissariat et de manif, on va y venir un jour. T’as pas vu en Amérique? Des activistes ont repéré que de plus en plus de flics, dès que filmés, sortent leurs propres téléphones et balancent de la musique en public, genre les Beatles et Taylor Swift, tout en continuant à aboyer et menotter. L’idée, c’est de rendre impossible aux gens qui les filment de poster leurs vidéos sur les réseaux sociaux. Parce que sur YouTube et Facebook, s’il y a quelque chose dans une vidéo qui se cogne aux lois sur le copyright, c’est verboten, ça cale. Pas moyen de le poster. Ils ont des programmes qui traquent et reconnaissent la musique, les extraits de films, etc. Des programmes pas toujours très efficaces, d’ailleurs, qui ne font notamment pas la distinction entre la citation à des fins critiques et l’exploitation commerciale. Mais bref, si un flic me tape dessus en faisant beugler Obladi Oblada sur son smartphone, il y a peu de chances que la vidéo puisse être partagée sur les réseaux sociaux parce que ces « robots » de Facebook et YouTube vont repérer une utilisation de la musique des Beatles par quelqu’un qui n’en possède pas les droits… et donc bloquer le tout. Les flics ont bien pigé ça et donc, maintenant, dès qu’ils se sentent des envies de gnons gratuits ou pas loin de dérailler, ils nous sortent leurs petites playlists qu’ils balancent à toute blinde.

Mais bon, t’imagines? T’es le Commissaire Vandersmissen et t’as le Predator de l’islamo-gauchisme cycliste anti-vaccination qui te jette des branches en plein Bois de la Cambre. Tu veux en faire du Canigou, tu te sais filmé… mais si t’hésites une seconde de trop entre Le Grand Jojo et Benny B au moment de choisir ta petite musique « pour pas te retrouver sur Facebook-Live », c’est la fracture du melon assurée. Moi, je ne vois qu’une solution à ça: déléguer le choix de la musique à un DJ, retirer cette préoccupation de la tête du flic en service. Ce qui ne devrait pas être très compliqué, ni très cher. Avec tout le matériel saisi cette année, il ne faudrait d’ailleurs même pas passer par Cash Converters: on colle une sono sortie du Greffe sur le toit d’une autopompe et vas-y pour la playlist 100% cop-friendly: Renaud, Village People, De Strangers, Jordy… Et hop, plus moyen de dénoncer, ni d’exposer une brutalité policière sur les réseaux sociaux puisque les droits de J’ai embrassé un flic y sont considérés comme plus importants que ceux des gamins se prenant en pleine fraise un cheval au galop. Merci les plateformes, merci la Sabam et ses consoeurs, merci la police.

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Ho, mais j’y pense. Un flic qui nous sort des chansonnettes qui ne sont pas les siennes en pleine manif, ça devrait justement fort intéresser les gestionnaires de toutes sortes de droits comme la Sabam, la Simim et autres Playright, non? Sur le site MyUniSono, j’ai simulé un « événement de publicité personnelle avec véhicule équipé de haut-parleurs » et ça va tout de même nous chercher dans les 27 euros de droits d’auteur à la journée, ce genre d’andouillerie. Quelqu’un passant régulièrement de la musique sélectionnée par ses soins à une foule grâce à un système d’amplification sonore pouvant par définition être un DJ, ne faut-il d’ailleurs pas aussi penser à doter tous ces policiers d’une « licence DJ » (223,13 euros + 6% de TVA par an)? Et puis, tant qu’à jouer au plus malin sur les réseaux sociaux, Taylor Swift, Paul McCartney et Ringo Starr me semblent tous joignables sur Twitter ou Instagram et ne seraient probablement pas du tout ravis d’apprendre que leur musique empêche désormais aussi de dénoncer des brutalités policières sur les réseaux sociaux. Tant qu’à leur envoyer des DM, on peut même lancer un crowdfunding international afin de leur payer une reprise à trois de Fuck Tha Police, tiens. Ce qui devrait cartonner et permettre de financer quelques bons avocats afin de chicaner les arrestations arbitraires. Holala, je m’emballe. C’est toujours comme ça en été: je deviens d’extrême gauche. Alors, Commissaire, on danse?

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