Critique | Musique

Le disque de la semaine: Broken Bells – After the Disco

Broken Bells - James Mercer et Danger Mouse © DR
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

POP | Que reste-t-il après le strass et la fête? Broken Bells, alias Danger Mouse et James Mercer, en tire le bilan doux-amer avec un 2e disque pop, élégant et humble.

Le disque de la semaine: Broken Bells - After the Disco

Il y a comme une contradiction dans le concept de pop adulte. Un oxymore quasi insoluble: comment concilier la fougue juvénile du premier terme et la « maturité » réfléchie du second? Comment raconter ce qui se passe après l’exaltation, après l’ivresse et la fête? After The Disco?…

Broken Bells est le « super-groupe » constitué de Brian Burton, alias Danger Mouse, et James Mercer, leader des Shins. Le premier s’est surtout fait connaître via son boulot de producteur (de Gorillaz aux Black Keys, de Beck à U2) et Gnarls Barkley, son autre duo avec Cee-Lo Green (Crazy). Quant à James Mercer, il est le leader du groupe indie américain type, lancé sur le label Sub Pop, joué en boucle par les college radios US. The Shins s’était notamment retrouvé au générique de Garden State (2004). Le film indé doux-dingue avait largement participé à la notoriété du groupe. Dix ans plus tard, l’humeur n’est forcément plus la même. Le spleen ado a filé en mélancolie pastel.

C’est en tout cas ce que semble raconter After The Disco, deuxième disque de Broken Bells. Après un premier essai éponyme qui avait connu son petit succès (plus de 700.000 albums écoulés), sorti l’année où Mercer fêtait ses 40 ans, Broken Bells semble plus que jamais servir de véhicule aux humeurs adultes, à la fois maîtrisées et un poil désenchantées. Le genre de disque qui derrière l’enthousiasme et l’humour, cette politesse du désespoir, est capable de vous balancer des phrases du genre: « What a lovely day to be lonely. »

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Vernis eighties

L’album débute avec Perfect World, motif de synthés new wave, ligne mélodique mellow cake à la New Order. Juste après le disco donc… Plus loin, le single Holding On For Life sème pourtant le doute: n’est-ce pas un des Bee Gees qui a pris la place de Mercer derrière le micro, falsetto boule à facettes (celle qui ornait la pochette du premier album) qui tournerait au ralenti? Le morceau est assez illustratif de l’album, de son ambiance de lendemain de veille, entre gueule de bois et résilience: « Well you might belong to another time/Still you have to carry on. » Farce, Broken Bells joue bien de temps en temps le clin d’oeil ou la citation -comme ce titre The Remains of Rock & Roll ou cette intro de basse à la Cure (période Seventeen Seconds), voire Joy Division, sur un morceau intitulé Control. Jamais pourtant l’humour tongue-in-cheek ou les références ne prennent le pas sur la bienveillance de l’entreprise.

Les qualités d’After The Disco sont aussi un peu ses défauts. Dompté et canalisé à l’extrême, refroidi au vernis eighties, il se prive de tout coup de force. Danger Mouse trouve toujours bien une pirouette pour détourner le morceau du droit chemin pendant quelques secondes. Mais jamais de manière spectaculaire ou ostentatoire. Humble, le geste de deux compères n’en est que plus louable, s’effaçant derrière les chansons, leur laissant faire tout le boulot. De la pop adulte, qu’on disait donc. Et de ses limites.

  • DISTRIBUÉ PAR SONY.EN CONCERT LE 31/03, À L’AB, BRUXELLES.

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