Couleur Café: Sean Paul, un tube après l’autre

© Couleur Café/Leen Van Laethem
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

En tête d’affiche de sa première journée, Couleur Café n’a pas chipoté. Un bon Sean Paul des familles, ça fait toujours l’affaire. C’est bien simple, le Jamaïcain est de toutes les fêtes, de tous les tubes. Ce n’est même plus un chanteur, c’est un additif.

Le petit accent dancehall indispensable de l’esperanto pop mondial, celui qu’on ajoute dans la sauce au dernier moment pour relever le plat. Au final, on parle toujours de junk food, mais avec ce petit parfum estival en plus, qui rend le plaisir encore (un peu) plus coupable.

Sur scène, le chanteur-toaster est accompagné d’un batteur, d’un clavier et d’un bassiste on ne plus flegmatique. Une formule somme toute basique. A ses côtés également, un ‘backeur’ et puis deux danseuses gentiment « dancehall », longues tresses et cyclistes chamarrés de circonstance. Sean Paul lui-même porte relativement sobre, hormis le veston qui confirme le retour à la mode du fluo éboueur.

La mission du soir est simple : ambiancer le public venu célébrer l’été, la musique, et l’amour. Et pour ça, on peut compter sur le Jamaïcain. A 47 ans, Jeune Paul est un vieux briscard à qui on ne la fait plus. Pas qu’il soit un dieu de la danse (son jeu de lunettes – je les remonte, je les rabaisse – est plus impressionnant) ou qu’il dégage un charisme absolument incroyable. Mais, armé de sa pelletée de tubes, il n’a qu’à dérouler sa gouaille made in Kingston pour faire tourner les serviettes. Comme dans le clip de Cheap Thrills avec Sia (plus d’un milliard 300 millions de vue sur Youtube…), dont des extraits diffusés sur le grand écran, dans le fond de la scène, rappellent les concours de twist télévisés américains, dans les années 50.

Certes, Mr Paul n’oublie pas ses racines – sa reprise du standard I’m Still In Love With You, son classique Temperature balancé en toute fin de set. Mais le plus souvent, il préfère encore se balader sur la FM internationale, entre déhanchements latino (le Bailando d’Enrique Iglesias, à défaut d’avoir pu se placer sur Despacito – cela arrive, même au meilleur) ou hit passe-partout – l’affreux Rockabye de Clean Bandit. Et si, par le plus grand des hasards, il n’est pas présent sur le tube en question, Lange Pol s’en fout : il le reprend quand même à son compte (la scie Shape Of You d’Ed Sheeran). Sacré Sean…

COULEUR CAFE EXPRESSO

Rue à deux sens

On a beau dire que tous les festivals se ressemblent, Couleur Café reste malgré tout un moment et un endroit à part. Arrivé au Parc d’Osseghem, il y a trois ans d’ici, il a su faire du lieu un parfait terrain de jeu pour son mix urbain-world-pop. On reprend donc les fondamentaux : les trois scènes principales (red, blue, et green dans le théâtre de verdure), les podiums annexes (le dub corner, toujours aussi mortel), etc. Mais tout de même un nouveauté : la fameuse Rue du bien manger longe désormais l’avenue du Gros tilleul. Ce qui permet de la prendre par les deux bouts. Mais qu’on ne s’y trompe pas : aux heures de pointe, elle continue malgré tout à n’être qu’une longue file…

King van Brussel

On arrive pour la fin du concert de Zwangere Guy. A Couleur Café, le MC Dégueulasse est chez lui. Il a d’ailleurs invité ses potes sur scène : comme le 77, Blu Samu ou encore Selah Sue. Torse nu, il éructe, saute sur les premiers rangs, clame son amour pour sa ville. En néerlandais dans le texte, mais avec une aura et une zwanze qui dépasse le folklore pour toucher au coeur. Et c’est évidemment un triomphe. Il y a quelques jours, il rejoignait Arno sur scène pour accrocher son Gorik Pt 1 aux Yeux de ma mère de l’Ostendu. Ce n’était pas forcément un passage de relais, mais peut-être bien, malgré tout, la confirmation que Brussel a un nouveau king.

Fiesta cumbia

Le coup de coeur de la soirée ? Peut-être bien La Yegros. En tout cas, s’il y avait un artiste qui correspondait bien à l’ADN de Couleur Café, c’était l’Argentine. Avec sa nu cumbia et ses rythmes chamamé déviant, elle a emballé tout son petit monde sur la Blue Stage. Pas de grands élans tangos dramatiques ici. La Yegros fait plutôt dans la comédie sociale et le surréalisme magique – sur ses épaulettes, des plumes qui lui donnent l’air d’un petit piaf tropical. Roulant les r en avalanche (« muchas grrrrrrrrrracias !), elle chante avec un mélange de Betty Boop latino et de vinaigre punk. Musicalement, ça part dans tous les sens : flûte des Andes, guitare wawa, giclée d’accordéon, électro psychédélique, effets twang (Viene de Mi), etc. Avec pour socle commun les rythmes dodelinant de la cumbia et du chamamé, pour faire onduler les corps.

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