UN AN AVANT LE COUP D’ENVOI DE MONS 2015, L’ALHAMBRA ROUVRE SES PORTES AUX MUSIQUES DE JEUNES ET AUX CONCERTS. LA PROCHAINE CAPITALE EUROPÉENNE DE LA CULTURE SE MÉTAMORPHOSE.

L’écran géant n’a pas encore été accroché. Pas plus que la scène n’a été installée. Sous les échafaudages et une fresque de Bonom, le nouveau revêtement de sol est encore recouvert de ses protections. Signe des ouvriers à l’ouvrage, les coups de marteaux résonnent. A deux pas de la Grand-Place, l’Alhambra, qui fut tour à tour un cinéma, une discothèque, un bowling et une salle de concerts et spectacles (On Air Studio), fait peau neuve. Prête, et bien décidée à redevenir un haut lieu de la vie nocturne montoise. D’une capacité de 325 personnes, l’Alhambra new look, doté d’un fumoir pour éviter de se fâcher avec les voisins, sera inauguré le week-end des 23, 24 et 25 janvier avec entre autres les Tangerines et les Naïve New Beaters.

« Mons est gâté en termes d’infrastructures culturelles, reconnaît Yves Vasseur, Commissaire de la Fondation Mons 2015 et directeur du Manège. Mais il lui manquait clairement un lieu pour les musiques actuelles. Dès que nous avons appris que l’Alhambra était louable, nous avons lancé une étude de faisabilité. La salle est dans le centre-ville. C’était un investissement raisonnable et amortissable dans la durée. »

Le rafraîchissement, la déco, la sécurisation et la mise aux normes ont avoisiné les 100 000 euros. Si le bail ne court que jusqu’à mi-2016, c’est avec une option de prolongation. « Mons 2015 ne sera pas qu’un feu d’artifice de onze mois. L’événement doit donner un nouvel élan à la région. Et l’idée est de pérenniser les avancées. Dans ce cas-ci, permettre au Manège de poursuivre l’aventure dans de bonnes conditions. »

Comme il aurait été idiot de ne pas utiliser les lieux pendant un an, l’Alhambra accueillera l’after party/DJ set des Girls in Hawaii, une soirée Jaune Orange (Pale Grey, The Feather, Fastlane Candies), Hippocampe Fou, Veence Hanao ou encore les Intergalactic Lovers d’ici la fin mars. Tous les jeudis, la salle vivra aussi au rythme des soirées WINE, pour « Weekend is Not Enough ». L’espace sera par ailleurs disponible à la location ou pour des coproductions.

Tout un symbole, la conférence de presse qui annonce sa réouverture se tient sur un chantier. Un grand chantier: c’est un peu ce qu’évoque Mons pour l’instant, un an tout juste avant de devenir la Capitale européenne de la culture. « On est dans les clous, estime Yves Vasseur. Je ne vais pas prétendre que tout sera nickel chrome pour le coup d’envoi comme à Marseille. Certains lieux n’auront pas terminé leur métamorphose. Mais il y aura de quoi faire la fête. La ville aura une autre allure, évoluera. Pour je l’espère mieux vivre et permettre de se cultiver ensemble. »

Le pôle muséal par exemple ne sera finalisé qu’au printemps 2015. Et le chantier de la gare, compliqué, va prendre du temps. L’idée est moins de vivre avant que d’exister après. « Chaque capitale européenne de la culture a ses spécificités. On ne peut pas comparer Mons à Lille et Lille à Bruges. Mais le succès de Lille 2004 est selon moi lié à des lieux emblématiques comme le Tri Postal qui lui ont survécu. Il faut faire en sorte qu’il en soit ainsi chez nous aussi. Et ce sera le cas. »

Les projets sont connus, préparés, budgétés à 85 %. « Nous nous laissons une petite marge pour les idées nouvelles et nous commençons à concrétiser. Répétitions, ouverture d’ateliers pour la conception des costumes… Tout ça va se mettre en branle de manière assez souterraine. »

Désacraliser la culture

La programmation de Mons 2015 repose sur deux grands axes. Le premier s’articule autour de quatre figures emblématiques. Celles de Vincent Van Gogh, de Paul Verlaine, de Roland de Lassus, « magnifique musicien montois de la Renaissance » et, pour la mémoire et l’Histoire, du personnage mythique de Saint-Georges. Quatre personnalités ancrées dans l’inconscient collectif des Montois mais qui sont aussi éminemment européennes. « Et c’est ce qu’on nous demande: une passerelle entre les grandes idées de l’Europe et la réalité du territoire. »

L’autre grand volet de Mons 2015, c’est la rencontre entre culture et technologie. « Tout un pan du programme fera la part belle aux arts numériques, à des installations digitales, à des visites virtuelles. Ces deux axes se complètent et sont en phase avec ce que l’Europe est et devient: un continent avec des racines profondément ancrées dans un terroir culturel traditionnel qu’on doit revendiquer et en même temps avec des perspectives étonnantes dans ce qu’on appelle les nouvelles technologies. On baigne dans un va-et-vient culturel. Un va-et-vient de formation et d’enseignement. Un va-et-vient économique. Les universités et les entreprises embarquent avec nous dans cette aventure. »

Conseiller artistique, Philippe Kauffmann s’imagine bien réinventer le concept de parc d’attractions dans les jardins du Beffroi. « Dans le genre de Meli, où les poubelles te disaient merci dans le temps lorsque tu y mettais tes déchets. Ou des parcs d’attraction à l’abandon. Nous voulons éblouir les gens et métamorphoser la ville. Faire redécouvrir les rues, les jardins, les façades. Quelque chose d’à la fois ludique et politique. Des questions se posent. Que peut-on encore faire dans l’espace public? Qu’est-ce qui n’est pas privatisé? L’été, la Grand-Place est réservée aux terrasses des cafés. Nous voulons désacraliser la culture. Les gens ont peur: il faut les rassurer. »

TEXTE JULIEN BROQUET

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