Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

LE CENTRE POMPIDOU REDESSINE LES CONTOURS DE L’ART MODERNE À TRAVERS UN ACCROCHAGE REPRENANT PLUS DE 1000 OEUVRES SIGNÉES PAR 400 ARTISTES. MASSIF.

Modernités plurielles de 1905 à 1970

CENTRE POMPIDOU, À 75004 PARIS. JUSQU’AU 26/01/2015.

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Pour dire la vérité, on a failli passer à côté de Modernités plurielles. On s’en serait mordu les doigts -enfin pas forcément car on ne peut regretter ce dont on n’a pas conscience. Il reste que cette exposition du Centre Pompidou établit une nouvelle cartographie de l’art moderne -arts plastiques, photographie, architecture, cinéma, design…- de 1905 à 1970. Loin d’être inutile, cette perspective inédite a pour mérite de nous sortir de l’épouvantable conformisme qui fait se succéder les mouvements artistiques comme lubrifiés par un principe supérieur aux allures de logique dialectique. Bien sûr, dans la réalité, ces rouages bien huilés n’existent pas, chaque avant-garde apparaissant comme un nouveau grain de sable, obligeant cette chose qu’on appelle l’art à se redéfinir, à se reformuler et enfin à digérer ce qui se met en travers de son chemin.

Comme l’écrivait Serge Lemoine à propos de l’art du XXe siècle, il faut sans cesse remettre son ouvrage sur le métier: « On a tant créé durant ces 100 années, tant inventé, tant bouleversé mais aussi tant suscité de débats, de malentendus, d’incompréhension, de polémiques, qu’il faut revenir sur ce que ce siècle a donné dans le domaine artistique maintenant que l’Histoire a déjà largement fait son office. » C’est bien ce que se permet cette exposition, placée sous la houlette de Catherine Grenier -épaulée par une équipe de conservateurs et de chercheurs. Le tout opéré en fouillant une matière première de choix, à savoir les collections du Centre Pompidou. Bien vu, le charme fonctionne d’autant plus que cette relecture évite la tentation « européocentriste » en soulignant la puissance des marges et des périphéries.

Révolution copernicienne

Résumer ce parcours maousse costaud qui balade à travers un bon millier d’oeuvres et 47 pays différents n’est pas une sinécure et surtout n’a pas grand intérêt. Ce qui importe vraiment, c’est d’en retenir les lignes de force. Par exemple, l’approche temporelle. Si l’exposition suit un cheminement chronologique, elle ne néglige pas les fulgurances et les ruptures, substituant par là le schème de la connexion, du transfert ou de la résistance à celui du tracé linéaire. Ce qui est vrai pour le temps, l’est forcément pour l’espace. La plus belle preuve en est donnée par la sélection d’oeuvres réalistes qui se sont développées dans les pays latino-américains via le mouvement brésilien de l’anthropophagie et les courants dits « indigénistes ». Enfin, on pointera du doigt la place faite aux femmes artistes trop souvent expurgées de l’Histoire officielle. Les travaux de Natalia S. Gontcharova, Sonia Delaunay, Frida Kahlo, Georgia O’Keeffe… sont ici restitués dans toute la force de leur propos.

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MICHEL VERLINDEN

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