
Michael Jackson, air contemporain
À Paris, au Grand Palais, l’exposition On The Wall se penche sur Michael Jackson. Non pas en creusant son oeuvre, mais en analysant le regard que l’art a pu porter sur le Roi de la pop.
À quoi reconnaît-on les icônes? Sans doute au fait qu’on ne les épuise jamais complètement. Ainsi en va-t-il de Michael Jackson, chanteur-compositeur-danseur-perfomeur-acteur parmi les plus influents de la pop culture, figure artistique essentielle du XXe siècle. Dix ans après sa mort inopinée (le 25 juin 2009, à l’âge de 50 ans), il continue de fasciner et d’influencer. La preuve avec l’exposition On the Wall, qui, initiée par la National Portrait Gallery à Londres, a atterri au Grand Palais à Paris, jusqu’au 14 février prochain.
Sa particularité? Non pas se pencher sur l’oeuvre de Michael Jackson en elle-même, mais bien sur son impact dans le champ de l’art contemporain. Il ne s’agit donc pas ici d’une grande rétrospective à la David Bowie Is (1). Hormis une veste noire « customisée » avec cuillers, couteaux et fourchettes en argent (la fameuse dinner jacket signée Michael Lee Bush, commandée par le chanteur lui-même), aucun objet du Roi de la pop n’est exposé. À la place, On the Wall -référence évidemment à l’album Off the Wall, son premier mégasuccès solo, sorti en 1979- rassemble des oeuvres d’une quarantaine d’artistes, de 1980 à aujourd’hui. En faisant l’impasse sur Jeff Koons et sa fameuse porcelaine figurant Michael et son singe Bubble (celle-ci est néanmoins rappelée par des photos de Louise Lawler et la réinterprétation satirique de Paul McCarthy). Mais en incluant des travaux d’Andy Warhol, Keith Haring, David LaChapelle ou encore Kehinde Wiley, pour ne citer que les plus connus.
Enfant-star devenu star-enfant, Michael Jackson fut à la fois épouvantail (dans The Wiz, version afro-américaine du Magicien d’Oz) et zombie ( Thriller), voyou hargneux ( Beat It, Smooth Criminal) et blanche colombe ( Heal the World). Comment dès lors le cerner? Du parcours, découpé en huit salles, il en ressort un portrait, certes inégal, mais qui a le mérite de s’attarder au moins autant sur l’artiste que sur le « phénomène ». Logique: celui que l’on a parfois surnommé Wacko Jacko a repoussé à la fois les limites de sa discipline et établi, parfois à son insu, de nouveaux standards dans le culte de la célébrité. La star a pu ainsi susciter l’unanimité (le raz-de-marée de Thriller), l’idolâtrie (un extrait, fascinant, d’un concert en 1992, à Bucarest, s’attarde au moins autant sur ce qui se passe sur scène que dans le public, littéralement à la merci du moindre mouvement de la star). Mais aussi la controverse -du visage de Jackson, la vidéo de Jordan Wolfson n’a gardé que les yeux, captés lors de sa fameuse apparition télévisée de 1993, dans laquelle le chanteur se défend des allégations de pédophilie.
La vie de l’artiste fut excessive, par bien des aspects outrancière et démesurée. C’est ce qui l’a rendue flamboyante. Mais aussi profondément déprimante. On the Wall n’échappe pas à ce constat, tout en le nuançant de touches plus poétiques. De manière assez surprenante, elles sont surtout l’oeuvre de fans. Le chorégraphe Jérôme Bel filme par exemple une trentaine de personnes, amateurs et professionnels, reproduisant le fameux moonwalk popularisé par Jackson, lors du 25e anniversaire de la Motown, en 1983. Plus loin, une installation vidéo signée Candice Breitz montre une quinzaine de fans reprenant les morceaux de l’album Thriller ( lire plus loin). À ce moment-là, la figure de Michael Jackson n’est plus seulement celle d’un artiste immense, personnage « monstrueux » au destin fracassé. Elle redevient aussi simplement humaine.
On The Wall, Grand Palais, Paris, jusqu’au 14/02. www.grandpalais.fr
(1) L’expo conçue par le Victoria & Albert Museum fait l’objet désormais d’une application, disponible depuis ce 8 janvier, jour-anniversaire de la naissance de David Bowie. davidbowieisreal.com
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