Vivre vite

© National

Dans les années 90, Brigitte Giraud suit le parcours classique d’une jeune femme débarquée d’une ZUP (“zone à urbaniser en priorité”) de Lyon, qui tente avec son mari Claude de s’établir en centre-ville, de construire une famille, d’amorcer une carrière dans le monde des lettres et des idées. Un enfant, une trajectoire résidentielle heurtée qui se stabilise, un puis deux livres publiés, et surtout une complicité folle avec son motard de conjoint. Seulement voilà: le 22 juin 1999, un accident de la route expulse sans ménagement ledit Claude du tableau. Aux projets d’avenir se substitue un deuil intime, profond, dont elle mettra des années -sans doute plus d’une vingtaine- à tenter de se remettre. C’est en cette rentrée que paraît Vivre vite. Un roman consacré, sinon à la simple narration d’une banale progression à deux tranchée net dans un froissement de tôle, plutôt au décorticage minutieux de la longue file indienne de 23 “siqui auraient pu faire que “nous n’aurions rien su de cette journée, qui aurait été comme les autres, ni remarquable ni mémorable, sans qu’elle suscite aucune question ni aucun récit”. Émaillée d’adresses affolées de l’autrice d’aujourd’hui aux personnages d’alors (“Reste là”, “N’appelle pas”, “Ne prends pas les clés”…) et même parfois d’un humour salvateur, cette litanie s’apparente tantôt à un Livre dont vous êtes le héros à l’issue figée, tantôt à une bienfaisante réflexion sur une culpabilité auto-infligée. Un tour de force en tout cas, qui applique du baume sur des plaies encore ouvertes.

De Brigitte Giraud, éditions Flammarion, 208 pages.

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