Le sponsoring du rock par une marque, c’est d’abord le travail sur l’image, de préférence jeune et énergique. La preuve via la Hilfiger Denim party à Berlin.
La marque US de fringues Hilfiger n’est pas novice en matière d’associations tapageuses: notre rédac-chef (bien aimé) se souvient encore de la fabuleuse fête parisienne conviant rien moins que Lenny Kravitz à l’Ecole des Beaux-Arts pour un barnum d’invités, traités VIP jusqu’aux plus infimes détails de la suite d’hôtel velourée 5 étoiles. A d’autres occasions, Hilfiger a sponsorisé des mammouths (Stones, Bowie) sans jamais oublier de mettre dans le coup quelques pépées bronzées, de Beyonce à Iman. Belles et décibels, ça rime. La fameuse crise étant passée par là, le journaliste invité doit se contenter d’un logement downgradé (4 étoiles) et, quand même, de suffisamment de tickets boissons que pour ouvrir son propre bar. Pour l’occasion, Hilfiger Denim -son département street et djeunes – se vend via des célébrations plus intimes. Et nettement moins coûteuses. Après une première à Amsterdam au printemps, c’est Berlin qui accueille la seconde Hilfiger Denim Live, soit une affiche rock/hip hop/électro au WMF. Le genre de club où passent habituellement des artistes du calibre de Miss Kittin. Rien de gigantesque et, de plus, l’entrée est mixte: gratuite pour les beautiful people et les intrépides reporters, payante à 10 euros pour les gogos persuadés que ce genre d’événement est du cousu main dans un ourlet de prestige. Dans ce raout à 50 000 euros – chiffre officieux -, il est question de décibels visibles: à savoir que la tête d’affiche – les New-Yorkais de The Films – servent également à l’image de la campagne automne/hiver de la marque. Le quartet de rock garage est new-yorkais mais la pub exclusivement à destination européenne… La salle, environ 500 personnes, s’agite au son graveleux des Films, efficace mais sans trace aucune de génie rock. Après le set, écroulé dans un fauteuil, le chanteur n’est guère disert sur son rôle dans cette connection musicalo-vestimentaire. Même si c’est lui qui occupe la place prépondérante de l’affiche de la campagne, comme il se doit, au bras d’un mannequin vaguement anorexique. Mais comme le dit le bassiste, il s’agit là d’une » situation qui bénéficie aux deux parties en présence, et puis l’association musique-mode remonte au moins à Elvis. » Certes, The Films pourraient être les nouveaux Strokes – on n’y croit pas un instant – mais la véritable raison de cette parenté est avouée un peu plus tard par une Hilfiger girl: simplement, » ce genre de groupe-là n’est pas très cher ». Ce qui est cynique mais logique dans une économie désormais prudemment aventureuse. Parmi la demi-douzaine de groupes/DJ’s qui font l’affiche hilfigérienne ce soir-là à Berlin, il y a N.A.S.A., intéressant groupe américain de hip hop sous périscope rock. Leur premier album ( The Spirit Of Apollo, Pias), paru début 2009, invite des pointures aussi variées que David Byrne, RZA, Chuck D ou Tom Waits à bramer sur des beats et des loops métissés. La moitié du duo, Squeak E. Clean (Sam Spiegel dans le civil), 29 ans, ne s’habille pas du tout Hilfiger mais admet recevoir des fringues pour l’occasion. Pas sûr qu’il les mette puisque lui-même vend ses propres lignes de mode… Alors quel impact sur les ventes de fringues ce genre de soirée peut-elle avoir? » Nous n’avons pas fait d’études, dit une PR de Hilfiger, mais ce qui est le plus important est que l’on parle de nous! » Mais qu’est-ce qu’on fait depuis toute une page, là?
Texte Philippe Cornet
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