LE TÉLÉCROCHET DE LA RTBF THE VOICE SERA À L’ANTENNE DANS QUELQUES SEMAINES. AMATEURS DE BOUCHERIE, PASSEZ VOTRE CHEMIN. REPORTAGE.

Michel Drucker, sors de ce corps! Mais qu’a-t-on fait à Lio, la meilleure pourvoyeuse de vacheries des dernières années de la Nouvelle Star, jamais en retard d’un Scud à fragmentation balancé sur la prestation d’un candidat trop minet, d’une jeune fille trop fade…? Lio dont les saillies fielleuses faisaient le miel d’un télécrochet qui s’essoufflait. Et qui s’est ici muée en fée Bisounours, abreuvant les apprentis chanteurs de compliments, câlins et sourires.

Talons aiguilles, blazer, mini vague gominée, presque sobre, elle a rejoint les jurés de The Voice sur la RTBF, plutôt que de rempiler avec ses camarades de M6 pour une nouvelle saison. Et en ce jeudi de novembre, elle est d’humeur maternante avec les graines de chanteurs qui s’essaient aux Blind auditions -une scène, 4 musiciens, un jury dos au candidat pour ne juger que de sa voix, et qui se retourne s’il souhaite le sélectionner dans son équipe.

Parce que The Voice table sur le coaching plus que sur la performance immédiate -pétri de valeurs de service public, il n’est pas étonnant que ce jeu ait tapé dans l’£il de la RTBF lors d’un exposé des grandes tendances de la télévision, en mars dernier.

Eric Poivre, directeur des programmes adjoint de la chaîne, souligne cependant qu' » on n’attendait pas la RTBF avec un format comme celui-là. On a essayé de nous en empêcher (l’interpellation de la ministre de l’Audiovisuel par un MR surpris de ce rachat d’un concept d’Endemol, et inquiet quant à d’éventuelles dérives propre aux téléréalités, ndlr) . Mais on fait de la vraie bonne télé, appuie-t-il, avec de l’émotion, du talent, et l’envie de transmettre des connaissances.  »

La RTBF croit en son bébé, dont l’accouchement est prévu  » fin 2011 ou début 2012 » -elle conserve le suspense, histoire de contrarier les velléités de contre-programmation de la concurrence. « Deux mots nous font avancer », confie Jean-Michel Germys, directeur des Divertissements: « Next level. On se demande sans arrêt: « Comment pourrait-on faire mieux?  » C’est devenu un vrai projet d’entreprise pour lequel tout le monde mouille sa chemise. On n’a qu’une envie, c’est que ça marche. Et on est très décomplexés par rapport à tout ça. «  La chaîne rêve de 25 % ou plus de parts de marché.

Cruauté

Le jury, composé de Lio, donc, mais aussi de Quentin Mosimann (gagnant de la Star Academy 7, venu avec un chihuahua à propos duquel il livrera une interview à un confrère de la presse quotidienne), Beverly Jo Scott (et ses formules à la JCVD), ainsi que de 2 membres du groupe Joshua, Greg et Senso, est ainsi chargé de dénicher des perles qui feront grimper les audiences et de les polir délicatement en 3 phases: auditions à l’aveugle, duels et grands directs.

A l’issue du premier round, chaque coach -puisqu’il sera à la fois juge et partie- se sera choisi 14 poulains, à entraîner, bichonner, et guider dans la compétition. Du gentil partout, donc. Si ce n’est que The Voice a ressuscité dans son studio liégeois la cruauté chère à Tête d’Affiche (le fameux éventail qui se refermait en fonction des votes du public pendant la prestation du chanteur) en alignant des dossiers de fauteuils face aux participants devant défendre leur place en 1’30. Si personne ne se retourne, c’est mort, retour à la maison. Si un coach pivote, il l’embrigade dans son écurie. S’ils sont plusieurs, c’est au candidat de choisir son mentor.

Aujourd’hui, la plupart des participants ne s’adresse qu’à des dos. Malgré les  » Tu as des capacités techniques impressionnantes« ,  » Tu m’as mis à l’aise avec ce type de chanson« , « Tu as une superbe voix », et, déjà, la gorge serrée:  » Ce regard (sous-entendu « déçu de ne pas avoir été sélectionné », ndlr) me donne envie de me lever de cette chaise et de céder la place à quelqu’un de plus fort que moi« , dixit B.J. Scott. Question théâtralisation, Lio assure le boulot -elle se lève, elle embrasse, elle étreint:  » C’était criblé de défauts, mais des défauts que j’aime« ,  » Dites-moi si vous chantez quelque part, je viens en courant« … On assiste même à une standing ovation des 5 coachs pour un candidat… éliminé.

Les chanteurs de salle de bain (mais luxueuse, la salle d’eau, pas de casserole rigolote au menu ici) enchaînent les échecs devant un public qui les applaudit mollement. Jusqu’à ce moment de grâce mettant en scène une jeune femme à l’énergie parfaitement maîtrisée, sur un morceau s’écartant sensiblement des scies variétoches qu’on est en droit d’attendre de ce genre d’émission, et que les jurés se disputent âprement.

B.J. Scott:  » You need me and I want you« , Greg: « Pourquoi venir chez nous? Parce que sinon j’arrête l’émission », Senso: « Tu auras 2 dépressions sur la conscience »

Une feel good émission, donc, « avant tout une aventure humaine », souligne Quentin Mosimann, qui a longuement hésité avant d’accepter ce job à la télé belge. « Ces dernières années, je suis devenu hermétique à la téléréalité. Mais ici, il n’y a pas de voyeurisme. Je pense que les amateurs de télévision pourront être déçus -je crois que cette émission est surtout faite pour les amateurs de musique. «  l

TEXTE MYRIAM LEROY

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