LA FILLE CACHÉE, BLACK ET FINLANDAISE, DE LEONARD COHEN SORT UN REMARQUABLE ALBUM, BEAU ET HANTÉ, SUR LE LABEL HISTORIQUE DU GRUNGE.
Mirel Wagner
« When the Cellar Children See the Light of the Day »
DISTRIBUÉ PAR SUB POP.
9
Quand les enfants de la cave voient la lumière du jour… Le titre du nouvel album, le deuxième, de la petite magicienne Mirel Wagner colle plutôt bien à ce qui semble attendre cette folkeuse finlandaise née il y a 26 ans en Ethiopie et élevée à Espoo (elle a été adoptée à un an et demi), la deuxième ville du pays, située à seulement quinze kilomètres d’Helsinki. Un passage donc de l’ombre aux projecteurs. De l’anonymat à une célébrité qui aurait tort de la bouder.
La première fois qu’on a succombé aux charmes de ce bout de femme habité, c’était en 2011 au Flow Festival où l’ambassade et le bureau d’export finlandais avaient invité quelques journalistes à découvrir leurs jeunes talents entre deux grosses machines à la Kanye West ou Janelle Monae. Pour finalement réaliser que, dans un autre circuit, elle donnait un concert chez l’habitant à Bruxelles quelques semaines plus tard.
Fan de Joni Mitchell, de Bob Dylan, de Neil Young et de Tracy Chapman, Wagner a troqué à treize ans son violon contre une guitare dont elle ne s’est plus jamais séparée. Et est tombée amoureuse au même âge de ce qu’elle appelle les blues dudes (Mississippi John Hurt, Muddy Waters, Son House et autre Skip James) grâce à ces compilations qu’on débusque parfois dans les recoins de librairie entre les toiles d’araignée…
Enregistré aux Shark Reef Studios dans la ville insulaire d’Hailuoto par le producteur électronique Vladislav Delay, When the Cellar Children See the Light of the Day a été composé en mode Bon Iver. Dans une vieille cabane en bois. Une cabane sans chauffage central ni électricité. La seule compagnie de Mirel -faisons pleurer dans les chaumières- étant une petite souris solitaire avec laquelle elle partageait ses repas.
Larme versée, ces conditions d’isolement et d’austérité ont aidé à faire naître ces petites perles décharnées que trousse un album aussi dépouillé qu’éblouissant. Si Leonard Cohen et Billie Holiday avaient été des femmes scandinaves, ils se seraient appelés Mirel Wagner. Aux croisements du folk et du blues, l’Afro-Finlandaise dégage une noirceur lancinante en mode minimaliste. Une guitare, une voix (seules deux interventions du compositeur et arrangeur écossais Craig Armstrong sont à signaler)… Il n’en faut pas plus à la singer-songwriter venue du froid pour évoquer PJ Harvey (1, 2, 3, 4) dans sa tension fragile, nous poursuivre la nuit (le frissonnant Dreamt of a Wave) ou marcher sur les traces de ses idoles en mode sombre et dépouillé. Dépressive? « Ce que je trouve triste, c’est la musique sans âme que déverse la plupart du temps la radio, disait-elle en défendant son premier album. Une musique sans vie, n’est-ce pas plus triste qu’une chanson mélancolique? »
LE 13/09 AU BIG NEXT FESTIVAL (GAND).
JULIEN BROQUET
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