Bonjour tristesse – Diane Kurys retrace la vie – mouvementÉe – de FranÇoise Sagan, auteur À succÈs doublÉe d’une femme libre, qu’incarne mimÉtiquement Sylvie Testud.
De Diane Kurys. Avec Sylvie Testud, Jeanne Balibar, Pierre Palmade. 1 h 57 (version cinÉma) et 3 h (version tÉlÉfilm). Lumière.
Auteur à succès, Françoise Sagan aura aussi incarné la liberté et l’indépendance d’esprit, pour accéder au rang d’icône. Flamboyant et, à moult égards fulgurant, son destin est de ceux dont le cinéma nourrit ses biopics – démonstration avec ce film de Diane Kurys ( Diabolo Menthe, Les Enfants du siècle) qui embrasse la vie de l’écrivain en 1954, lorsque âgée de 18 ans à peine, la publication de Bonjour tristesse, lui ouvre toutes grandes les portes de la célébrité. La suite, ce sera une existence hautement romanesque, dont Sagan s’emploie à retracer les étapes obligées en une reconstitution appliquée. A savoir, dans le désordre: les amis, le jeu, Honfleur, l’accident de voiture, l’écriture, les amours, l’insouciance, la drogue, l’alcool, la solitude, et on en passe, de New York à Saint-Tropez.
Le principal reproche que l’on puisse adresser à Diane Kurys tient à l’absence de point de vue d’un film qui se borne, pour l’essentiel, à aligner les vignettes. Encore que l’entreprise ne manque ni d’intérêt ni de souffle, atteignant même, dans son glissement vers une fin redoutée, à une poignante vérité. Le mérite en revient surtout à Sylvie Testud qui, dans le rôle de l’auteur de Des bleus à l’âme, signe ici une prestation exceptionnelle – elle est Sagan jusqu’au bout de la mèche des cheveux. Le reste de la distribution est au diapason avec, en particulier une mémorable Jeanne Balibar venue donner à Peggy Roche une grâce funambulesque. De quoi rendre ce film, si pas inoubliable, en tout cas fort estimable.
Epitaphe choisie
Outre les compléments habituels (commentaire audio de la réalisatrice, making of incluant des interviews de Diane Kurys et Sylvie Testud, bêtisier et première parisienne triomphale), cette édition propose également Sagan dans son format d’origine, à savoir un téléfilm de deux fois 90 minutes. La comparaison entre les deux versions est un exercice incontestablement intéressant. Non content de fort logiquement étoffer le propos (on y apprend, par exemple, que Sagan emprunta son pseudonyme au A la recherche du temps perdu de Proust, parmi d’autres détails, signifiants ou non), le téléfilm tend aussi à le sursouligner à l’occasion. Non sans multiplier les motifs ornementaux – ainsi, par exemple, d’un recours beaucoup plus systématique aux images d’archives.
Plus surprenant, Diane Kurys y opte pour une ouverture différente: alors que le film débute sur une image poignante de Sagan dans la solitude des derniers jours, la réalisatrice fait, ici, précéder cette scène (par ailleurs remaniée) d’un moment de liesse, ce 8 août 1958 où Françoise Sagan faisait sauter la banque du casino de Deauville – l’un des nombreux épisodes flamboyants d’une vie qui n’en fut point avare… Et sur laquelle l’écrivain ne laissera à personne d’autre le soin d’apposer une épitaphe: » Sagan, Françoise. Fit son apparition en 1954 avec un mince roman, Bonjour tristesse , qui fut un scandale mondial. Sa disparition, après une vie et une £uvre également agréables et bâclées, ne fut un scandale que pour elle-même. »
Jean-François Pluijgers
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