1935. Alors que le Bureau of investigation (BOI) prend le nom qu’on lui connaît encore aujourd’hui, son patron John Edgar Hoover en a marre des fictions hollywoodiennes qui glorifient les gangsters, présentent les criminels comme des gens au-dessus des lois au train aisé, à la vie trépidante et passionnante. En pleine période de crise économique par dessus le marché. Hoover tient à ce qu’on raconte l’histoire du FBI et veut pour héros des agents fédéraux qui triomphent de la pègre. G Men (1935) est en ce sens une tentative délibérée de réhabilitation et a pour but clairement avoué de redorer les blasons. Il conte l’histoire d’un avocat, James Brick Davis, qui entre au FBI après que l’un de ses amis a été liquidé par des gangsters. Un rôle, tout un symbole, endossé par un habitué des personnages de truands, James Cagney, célèbre pour sa prestation de gros dur dans L’Ennemi public (The Public Enemy, 1931).

Rapidement, Hoover établit ce qu’il appelle The Dillinger Rule. Le FBI a de grandes histoires à raconter. Hollywood doit s’en charger. Quand l’usine à rêve ne romance pas ses exploits, elle peut produire des portraits plus questionnant d’agents sans scrupule. Hoover veut donc tout savoir des allusions au FBI dans l’industrie américaine du cinéma et s’assurer que ses agents soient bien perçus comme les gentils.

En 1952, pic anti-communiste aux Etats-Unis, Walk East on Beacon, qui traite des activités du bureau dans sa chasse aux espions rouges et est basé sur une histoire ( The Crime of the century) de J. Edgar Hoover en personne, tient de la propagande plus qu’autre chose. Si Pick Up on South Street (Le Port de la drogue, 1953) de Samuel Fuller suscitera la colère du « patron » qui, à défaut de pouvoir le faire modifier, interdira toute référence au FBI dans les campagnes de publicité, Hoover est encore consultant sur The FBI Story (La Police fédérale enquête, 1959) au casting duquel on retrouve James Stewart. Présent tous les jours sur le plateau, il oblige le réalisateur Mervyn LeRoy à retourner plusieurs scènes. Et si les 2 hommes sont amis, Hoover n’approuve le film qu’après avoir constitué un fichier secret sur LeRoy. De ceux qu’il utilisait pour faire chanter les puissants.

Quand il ne supervise pas directement les films, John Edgar continue de jeter un £il sur tout projet cinématographique qui fait référence à son bébé. En 1965, Hoover a même dans le collimateur L’Espion aux pattes de velours, un projet de chez Disney, mettant en scène un membre du FBI allergique aux chats. Une image un peu cucul dont il se serait apparemment bien passé dans les années 60.

Le producteur Robert Evans prétend qu’en 1967, il reçut la visite d’agents lui sommant de changer voire d’annuler son film satirique The President’s Analyst compte tenu de l’image peu flatteuse qu’il donnait du bureau. Evans se contentant au final de changer FBI en FBR et CIA en CEA au doublage. Et ce sous la pression des studios.

Main lourde

Des comédies grasses ( Big Mamma, Fausses Blondes Infiltrées) aux films d’action pas souvent rassurants ( Face/Off, Donnie Brasco, Les Infiltrés), le FBI est encore et toujours omniprésent dans le cinéma contemporain. Tous les films ne le dépeignent pas sous un mauvais jour. Le Silence des agneaux, qui a valu un Oscar à Jodie Foster dans le rôle de l’agent Clarice Starling, aurait même accru son nombre de recrues féminines. Mais la manière dont le FBI est traité dans les films,  » pas réaliste, la main lourde, empoté et en concurrence avec d’autres agences « , rend le bureau tellement malade qu’il organisait encore il y a peu un séminaire de 4 heures pour rectifier le tir et apprendre aux scénaristes comment le dépeindre de manière plus proche de la vérité.

J. Edgar, le film de Clint Eastwood, a évidemment suscité pas mal de commentaires. William Brannon, à la tête de la Fondation J. Edgar Hoover, qualifiant, pour un baiser entre hommes et un  » I Love you« , le scénariste Dustin Lance Black d’auteur à la réputation douteuse et aux écrits sensationnalistes.

 » On a fourni toutes les informations pour que l’histoire puisse être aussi précise que possible, déclare Mike Kortan, directeur assistant du Bureau fédéral d’investigation, qui a rencontré sur leur demande le grand Clint et DiCaprio. Mais ce qu’ils en ont fait, comme dans le cas de toute production, a entièrement été laissé entre leurs mains. » Big Brother is watching you…

J.B.

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