Les jeux explorant le cerveau et sa psyché ont tenu le haut du pavé au dernier Independant Game Festival de San Francisco. Après les conquêtes spatiales, place aux voyages intérieurs…

Cousin pixellisé du Sundance Film Festival auquel il emprunte le prisme alternatif, l’Independant Game Festival (IGF) de San Francisco récompensait le microcosme de l’ artgaming et de l’ indie gaming à la fin du mois dernier. L’événement plébiscitait trois titres articulés autour du cerveau, de ses liaisons nerveuses à son subconscient en passant par ses fantasmatiques capacités télépathiques. Un combo qui ne doit rien à la coïncidence puisque les artistes et collectifs arpentant, tout en gameplay, les couloirs de notre cortex fleurissent ces dernières années.

Comme une réaction aux jeux vidéo de consommation courante qui se résument (trop) souvent à défendre la terre d’une menace alien, à coloniser des planètes ou à explorer des galaxies, le jeu vidéo underground délaisse la folie des grandeur pour un trip introspectif. Sur les huit lauréats du dernier Independant Game Festival de San Francisco, trois plongeaient ainsi dans les méandres de notre esprit et de notre subconscient. Bloqué en fast forward, BrainPipe file ainsi à travers des canaux neuronaux tachetés de vagues fluo instables et psychédéliques. Prix de la meilleure B.O. à l’IGF, le titre de Digital Eel demande au joueur d’éviter obstacles et ennemis tout en récoltant des bonus. Chaque élément croisé provoque un bruitage sous effet doppler, qui se marie avec l’ambient, la downtempo et la drum’n’bass de ce voyage. Du LCD sous LSD.

Psycho joystick

Cinquième art game de Jason Rohrer, Between traite de conscience et d’isolation, d’éveil et de sommeil. Une mécanique de jeu barrée projetant les protagonistes dans la construction d’une tour à l’aide de blocs colorés. Les objectifs de Between ne sont pas immédiatement perceptibles. Une démarche volontaire pour Rohrer qui a ainsi décroché le prix de l’innovation. Se fendant d’un gaming nettement plus terre à terre et classique, Cortex Command a raflé leprix de la technique et du public. Une exploration intéressante de la télépathie qui booste le gameplay du jeu Worms en dopant ses phases de combats directes et son parti pris stratégique.

Si BrainPipe, Between et CortexCommand baignaient dans les zones cachées du subconscient à l’Independant Game Festival, hors concours, indie et art gaming s’y complaisent aussi depuis quelques années. Au-delà du Metempsychosis de Sg5 et du Closure de Jon Schubbe et Tyler Glaiel, le psychique s’inscrit avec rémanence dans l’£uvre des frères Virtanen. Fort – entre autres – d’une mise en abyme lynchéenne explorant les méandres du cerveau d’un enfant autiste en mode puzzle game dans Virtual Silence, le duo revenait il y a peu avec The Manipulator. Un jeu de plate-forme en 2D émaillé de graphismes en fil de fer vibrant qui amène le joueur à manipuler mentalement ses ennemis pour progresser.

Autre auteur majeur et hyper prolifique d’art gaming, Jonatan Söderström, dit « Cactus », déploie un plate-former chimérique, candide et suicidaire des plus stupéfiants avec Psychosomnium. Et termine une liste d’ indie games plongeant dans les méandres de notre conscience comme l’a fait le cinéma à ses débuts ( Le Cabinet du Dr Caligari, le Diabolique docteur Mabuse…). Un signe fort pour le dixième art?

Texte Michi-Hiro Tamaï

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