Princesse Erika

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chanteuse aux racines et inspirations multiples, Erika de Casier incarne un inventif métissage musical dans un second album volontiers minaudé.

Erika de Casier e Ramos Lizardo, de mère belge et de père capverdien, née en 1999 au Portugal, déménage au Danemark à l’âge de huit ans. Si toute biographie laisse des traces, celle-ci d’autant plus que le sentiment de différence marque cette fille internationale. Elle et son frère seront souvent les seuls métisses de leurs établissements scolaires. Ajoutez-y qu’Erika passe une année d’adolescence aux États-Unis, et la voilà naturellement au carrefour de cultures multiples, pas forcément convergentes.

Elle vit quelques expériences solo ou pas: un duo au Roskilde Festival en 2015, un remix pour Dua Lipa et puis un passage au prestigieux Boiler Room. Tout cela croise la parution d’un premier album publié sur son propre label en 2019, Essentials. Il conjugue des rythmiques électro minimalistes à un formalisme plutôt mélancolique, alchimie originale entre quelques fantômes trip-hop nineties et les actuelles pulsions r’n’b. Avec cette voix qui est au centre du pari artistique: larynx crayeux, volume sans extravagance, tonalités feutrées et puis tout le charnel que supposent ces combinaisons. Si l’on pouvait fantasmer l’actuel et second album, on aurait cette bizarre pensée que c’est l’âme de Jeanette -googlez l’Espagnole qui cartonne à l’international en 1974 avec Porque te vas- revenue quasi un demi-siècle plus tard, dans une autre peau, une autre histoire, un autre tempo. Avec Auto-Tune ici et là…

Princesse Erika

Flûte alors

Fiction voire délire temporel, évidemment. Mais peut-être pas totalement puisque Sensational consiste en treize plages qui donnent l’impression de pouvoir s’effriter à chaque écoute. Et tout à coup regagner leur bunker existentiel, loin du monde. Le chant semble tellement en équilibre qu’on aurait presque peur de réécouter les morceaux, de crainte de les démembrer. Cet album élargit néanmoins les intentions du premier essai discographique. Tout en jouant toujours du trio référentiel, pop-electro-r’n’b, avec des pointes d’accélération hip-hop, Erika prend liberté avec les genres. D’abord, dans les intros et l’instrumentation des titres: le piano d’ All You Talk About, les très paisibles flûtes et le surround environnemental de No Butterflies, No Nothing, la harpe (?) d’ Insult Me. Dans une agréable voie tactile qui, au final, trace une forme certainement européenne de la musique. Il faut un peu décoder l’album, se laisser aller à son espace particulier et puis penser que la prochaine fois, la Belgo-dano-capverdienne se glissera encore davantage dans des chapes d’instruments. Histoire de prolonger et d’épanouir un prometteur parcours.

Erika de Casier

« Sensational »

Distribué par V2 Records. Le 17/11 au Botanique.

7

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