Horizons lointains – Port O’ Brien se fend d’un album remarquable évoquant les grands espaces. L’un des groupes favoris de M. Ward. L’un des nôtres aussi.
« Threadbare »
Distribué par City Slang/Cooperative Music.
« La vie d’un groupe, c’est un peu comme celle d’un équipage. Tu voyages longtemps en petit comité. Tu vois du pays. Tu n’arrêtes jamais. Tu pues et t’es mort crevé… » Van Pierszalowski sait de quoi il parle. Le chanteur de Port O’brien est fils de pêcheur. Il a travaillé sur le bateau de papa, chassant le saumon en haute mer, avant de plonger il y a 2 ans dans l’industrie du disque, ce monde de requins.
Au départ, Port O’Brien, c’est une petite barque fragile se la coulant douce sous le soleil de Californie. Van Pierszalowski et Cambria Goodwin, une copine de lycée, s’y réfugient pour écrire des chansons ensemble après l’école. Ils finissent par quitter leur patelin, Cambria (oui comme le prénom de Miss Goodwin), jettent l’ancre à San Francisco et se mettent à écumer bars et troquets. Histoire de grandir, d’occuper une embarcation et des ports de plus en plus grands, le duo embauche 2 matelots. Un bassiste et un batteur.
Quoi que puisse laisser suggérer sa musique, à commencer par son vieux mais imparable single I Woke Up today, Port O’Brien a composé ses 2 premiers albums en Alaska. L’antithèse de la Californie.
» L’Alaska est isolé du monde. Le temps semble s’y être arrêté. Il ne s’y passe rien. Les gens se font rares. Nous en avons profité pour écrire des chansons. Stratégiquement, c’était bien vu. On gagnait de l’argent en pêchant et on n’en dépensait pas à partir du moment où en Alaska, il n’y a vraiment aucune raison de claquer du pognon. »
Threadbare (usé jusqu’à la corde en français dans le texte) a d’abord été enregistré en février à Sacramento avec Jason Quever de Papercuts. » Mais nos morceaux ne nous plaisaient pas, avoue Van Pierszalowski. Nous avons donc décidé de tout reprendre du début. » Port O Brien s’est alors mis à retravailler ses morceaux à San Francisco avant d’achever l’enregistrement début mai à Los Angeles.
Majesté triste
« In Loving Memory Darac Dean Goodwin June 12, 1991 – January 4, 2009 ». La pochette du livret qui accompagne Threadbare fait plutôt froid dans le dos. Cambria a perdu son frère en début d’année. Il n’avait même pas 18 ans.
» La mort prend forcément une signification toute particulière mais, à la rigueur, les sujets abordés sur l’album m’importent peu même s’ils me touchent et endossent une dimension spéciale, confie-t-elle. Je retiens avant tout que cet album a dû composer avec la mort. Quand vous êtes frappé par une tragédie telle que celle-là, votre vie change. Votre vision des choses est affectée. Mais il faut savoir se relever. » Threadbare, d’ailleurs, est un album incroyable. Un album au sens mélodique toujours affirmé, à la majesté triste. Un disque sur lequel on ne veut rien jeter. Rien jeter sauf l’éponge. Terrassé par cette délicatesse, ces 2 voix poignantes et un groupe qui évoque Bright Eyes, Neil Young, Arcade Fire parfois et mérite assurément davantage de succès.
À la Rotonde (Botanique), le 20/11.
www.myspace.com/portobrien
www.portobrien.com
Julien Broquet
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