L’inflation de bonus est la dernière arme des labels pour tenter d’enrayer la dégringolade des ventes de CD. Pour le meilleur et plus souvent pour le pire…

Et la musique dans tout ça, elle est comment?« , s’interrogeait légitimement sur son blog(1) Francis Zegut, l’animateur de la radio française RTL2, quand il détaillait le contenu des coffrets « collectors » accompagnant la sortie du nouvel album de Placebo: Battle for the sun. On comprend son coup de gueule. Le disque passe presque inaperçu noyé sous une pluie d’autres suppléments plus (second cd avec titres rares) ou moins (certaines éditions renfermaient une invitation à un repas avec la bande à Molko avant un concert!) pertinents. Si tous les groupes ne se font pas coffrer de manière aussi luxueuse, presque toutes les sorties du moment sont, au minimum quand même, accompagnées d’un bonus multimédia quelconque. Sous la forme d’un dvd contenant interviews « exclusives » et autres « making of », ou de codes « secrets » permettant d’accéder à du contenu Web inédit. Une façon de donner un « plus produit » à l’acheteur potentiel. Et donc de tenter d’enrayer l’érosion des ventes de disque. Mais la musique en sort-elle grandie?

On n’attrape pas des mouches…

 » C’est la bonne question« , nous confirmait récemment Darius Keeler du groupe Archive. Qui sort 2 nouveaux albums cette année ( Controlling Crowds et Controlling Crowds part 4). Dépourvus, eux, de tout complément.  » Si on avait écouté certains pontes de notre firme de disques, avant d’enregistrer la musique proprement dite, qui reste quand même notre fonds de commerce ou je ne comprends plus rien, il fallait penser aux petits films qu’ils voulaient envoyer sur le Web en tant que bonus à nos albums. « Quitte à bâcler un peu l’enregistrement pour rester dans les budgets « , ont-ils ajouté. Nous avons évidemment refusé! Notre job, c’est de composer la meilleure musique possible, point. « Donc, pas question de servir une soupe dans laquelle les fans se chargeraient de cracher.  » Les acheteurs veulent de la bonne musique, rien d’autre. « Mais est-ce certain? Des chiffres officieux auraient tendance à le prouver en tout cas.  » Le dernier album de U2, No line on the horizon ,n’était pas fameux. Et, avec ou sans bonus multimédia, les gens ne se sont pas rués dessus. Juste parce que les morceaux proposés ne valaient pas 20 euros« , explique ce respon-sable du rayon musical d’une grande enseigne à vocation culturelle.

En se mordant la queue, puisqu’elle en vient à mettre l’accent sur l’accessoire (les bonus) en oubliant l’essentiel (la musique), réussissant du même coup à décontenancer encore un peu plus les acheteurs potentiels, l’industrie du disque a, finalement et bien malgré elle, remis au goût du jour l’idée que la qualité prime sur la quantité. Et même si ce n’était pas le but, c’est tant mieux. À l’aube de la sortie d’un nouvel album live, Daho Pleyel Paris, Etienne Daho résume la situation avec lucidité:  » Nous ne vendrons plus jamais autant d’albums que par le passé, c’est certain. Mais les fans sauront reconnaître les artistes restés loyaux envers eux. Si la franchise et la compétence sont au bout du chemin, pas besoin d’après moi de mini sites Internet ou de morceaux cachés pour appâter le chaland. »

(1) http://zegut.blogspot.com

Mao Boy

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