AVEC HORS-CHAMP OU LA RÉALITÉ HALLUCINÉE, MICHÈLE NOIRET POURSUIT SA ROUTE DANS LE DÉFI CHORÉGRAPHIQUE ET LE LABYRINTHE HUMAIN.

Entrée en douce aux répétitions de Hors-Champ. Moment volé, moment privilégié. On la voit à l’oeuvre, exigeante, cherchant une lumière précise, une osmose entre le plateau et l’écran. L’atmosphère est étrange -on la rapproche souvent de David Lynch-, même si, dans Hors-Champ, la référence change. « Comme dans Le Procès, d’Orson Welles, on retrouve un personnage principal qui dort, des intrus ouvrent la porte, son cauchemar commence. Le fil conducteur: comment passer de l’autre côté du miroir, entre le réel et l’irréel, dans le subconscient? » Depuis 1996, Michèle Noiret s’intéresse à l’image-vidéo, ici le cinéma: « Cela me permet d’aborder des dimensions plus complexes, en explorant l’espace, les perspectives, la taille des personnages. ».

Talent précoce, Michèle Noiret entre à l’Ecole Mudra de Maurice Béjart. A l’audition, une improvisation. « J’ai dansé en récitant Saint-John Perse, m’approchant à quelques centimètres de Béjart, où je lui disais qu’il allait mourir, comme tout le monde. Le culot des quinze ans, après j’ai viré timide, car dans la création on commence à douter. »

Camping sauvage & Stockhausen

Michèle baigne dans un milieu ouvert, fille du poète bruxellois Joseph Noiret, co-fondateur de Cobra: « On avait des fins de mois difficiles mais nos parents m’ont intéressée à l’art et à la vie. On faisait du camping sauvage en l’Italie. A la Cinémathèque, je voyais parfois des films enfants non admis sur lesquels on discutait. Ils nous intégraient dans leurs soirées d’amis (poètes, musiciens, peintres,…). Mon grand frère écoutait du rock (Kiss, Genesis, Black Sabbath…) et mon père, plutôt du jazz. J’allais de l’un à autre. J’improvisais des trucs dans ma chambre sur du Messiaen, j’écumais les boîtes de nuit, car j’aimais la danse et la transe. ».

Michèle Noiret termine Mudra en 1977, déjà repérée par le compositeur Stockhausen, pionnier de la musique électronique. « Avec lui, j’avais le corps divisé « en octaves ». Je créais les sons avec mes gestes.J’ai dû répéter un solo de neuf minutes pendant des mois pour le danser intuitivement, à ma façon. » La musique contemporaine imprègne toujours ses créations, signée de son complice Todor Todoroff, tout comme elle dialogue avec les lumières de Xavier Lauwers, autre complice essentiel. Avant eux, il y a l’effervescence de l’époque, l’Italie avec le danseur Micha van Hoecke, et New York où elle découvre la danse-contact qu’elle explore ensuite à Bruxelles avec Bud Blumenthal. Au fil des créations (Minutes opportunes, Demain…), la chorégraphe poursuit un chemin intime: « J’ai parfois l’impression de vivre dans une vie irréelle mais pour moi, la danse n’est pas hors du réel, elle s’imprègne des nuances de la vie, de la mort, avec ses souffrances, ses joies, sa beauté… » Après Hors-champ, l’artiste a envie de danser en solo sur le thème du labyrinthe, lieu d’impasses et de fausses pistes. Un dédale raffiné où s’égarer, une architecture savante de l’âme humaine qu’elle veut mettre en mouvement.

NURTEN AKA

HORS-CHAMP, JUSQU’AU 8 MAI WWW.THEATREANATIONAL.BE, DU 14 AU 16 MAI À PARIS (CHAILLOT).

WWW.MICHELE-NOIRET.BE

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