Un clochard, le hobo? Pas tout à fait. Plutôt un travailleur itinérant, sautant sur un train de marchandises pour rejoindre la ville suivante. Explications.

Cent hommes et plus se sont entassés dans ce train la nuit dernière, et il faisait froid. A présent c’est le matin, et les hommes semblent partis. Ils ont appris à se tenir à l’écart. (…) En regardant par-dessus une zone basse, sur laquelle poussaient les premiers brins de quelque chose de vert et de bon à manger, je vis les hommes, et je sus qui ils étaient et ce qu’ils faisaient. Ils frappaient aux portes, parlaient à des ménagères, offraient de travailler pour gagner un petit morceau de pain et de viande (…) quelque chose qui vous cale les côtes le temps de continuer sur la ligne. «  C’est Woody Guthrie qui parle, extrait de son autobiographie En route pour la gloire (1943). Figure essentielle de la musique folk américaine, il a partagé pendant plusieurs années la vie des hobos. Des vagabonds? Plutôt des travailleurs itinérants, poussés sur les routes par la Grande Dépression des années 30 et les sécheresses successives. Un peu comme le fut la famille Joad, au centre du roman de Steinbeck, Les Raisins de la colère, publié en 1939.

Pour se déplacer, les hobos ont pris l’habitude de se glisser dans les trains de marchandise. Non seulement les clandestins sont traqués par les services des chemins de fer, mais ils voyagent en outre souvent dans des conditions périlleuses, parfois sur de simples plateformes. Malgré leur individualisme, les hobos se structurent: ils se rassemblent chaque année lors d’une grande convention, érigent une charte (« Décidez de votre propre vie; ne laissez personne la ruiner ou la diriger »; « en ville, respectez les lois locales et les officiels »; « Aidez les enfants fugueurs, et essayez de les encourager à rentrer à la maison »…). Une sorte de code est même mis au point: un # tracé devant une maison avertit par exemple qu’un officier de police vit là…

Les Etats-Unis sortis du trou, le hobo continuera d’exister. Dans les Golden Fifties, il prendra notamment les contours du « clochard céleste » de Jack Kerouac (une imagerie renforcée plus tard par le mouvement hippie et ses penchants naturalistes). Et aujourd’hui? Il a toujours les traits « classique » du vagabond un poil anar, mais aussi ceux de l’immigré illégal latino à la recherche d’un boulot. Le transport par rail a certes décliné, mais le hobo lui-même s’est adapté. Sur le Net, on peut par exemple trouver le blog d’étudiants de la Columbia University partis sur la route, aux côtés des hobos (www.americanhoboproject.com). Le phénomène existe donc toujours. Et ce n’est pas la crise actuel-le qui risque de le faire décliner…

À voir également sur le Net la superbe série de clichés sur les hobos du photographe belge Stephan Vanfleteren (www.stephanvanfleteren.com)

L.H.

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