COURONNE ET ÉPINES – COLIN FIRTH EST IMPÉRIAL DANS CE DRAME HISTORIQUE DE TOM HOOPER REVISITANT AVEC BONHEUR LE DESTIN SINGULIER DE GEORGE VI, UN CARRÉ D’OSCARS À LA CLÉ…

DE TOM HOOPER. AVEC COLIN FIRTH, GEOFFREY RUSH, HELENA BONHAM CARTER. 1 H 58. DIST: PARADISO.

Avec 4 statuettes, dont celles du meilleur film, du meilleur réalisateur et du meilleur acteur, The King’s Speech fut assurément le grand vainqueur des derniers Oscars, damant le pion aux favoris, David Fincher et autres frères Coen, notamment. Si d’aucuns s’étonnèrent de ce crime de… lèse-majesté, le drame de Tom Hooper avait pour lui des arguments incontestables, revisitant avec bonheur le film d’époque dans sa déclinaison monarchique -un genre à part entière, pratiquement . Au c£ur de celui-ci, le futur George VI d’Angleterre (Colin Firth), qui n’est encore que duc de York au moment où on le découvre, en 1925, devant un stade de Wimbledon attendant, dans ce qui a tout d’une éternité, que sorte un son de ses lèvres, désespérément scellées devant le micro de la balbutiante BBC.

Bertie, comme on le surnomme, a grandi à l’époque de l’apparition de moyens de communication de masse -une malédiction, pour cet homme dont le manque de confiance en soi confine au cauchemar, matérialisé dans un bégaiement insurmontable en apparence. Autant dire qu’il ne semble guère taillé pour une fonction qui, si elle fait parfois l’homme, a aussi ses obligations. Soutenu par sa femme (Helena Bonham Carter), le prince ne cesse, dès lors, de consulter des spécialistes -jusqu’à, en désespoir de cause, franchir le seuil d’un logopède un brin loufoque, Lionel Logue (Geoffrey Rush). Australien d’origine, et acteur shakespearien raté à ses heures perdues, ce dernier est un autodidacte, tenant de méthodes aussi peu orthodoxes que controversées. Bertie surmonte cependant ses réticences initiales, au point que la confiance s’installe bientôt entre les 2 hommes, d’autant plus bienvenue que les circonstances vont forcer la main au duc de York, lorsque son frère Edouard VIII est contraint d’abdiquer, en 1936…

L’angle anglo-australien

Ce destin singulier, et cette amitié qui ne le fut pas moins, Tom Hooper les met en scène avec une vibration toute personnelle – « J’ai toujours voulu faire un film sur le lien entre l’Australie et l’Angleterre », confie, dans les maigres compléments de cette édition, un réalisateur né d’une mère australienne et d’un père anglais. Un peu surprenant de prime abord peut-être, le prisme envisagé vaut au cinéaste de trouver la juste distance par rapport à son sujet, pour signer un film passionnant, qui superpose aux enjeux de la grande Histoire ceux d’une histoire intime fascinante.

Porté par des acteurs complices, et transcendé par la prestation tout simplement impériale de Colin Firth, le film y trouve des accents profondément humains, glissant avec naturel d’une émotion à l’autre. L’intelligence du scénario, et la vigueur, discrètement inspirée, de la mise en scène, achèvent de faire de The King’s Speech une authentique réussite -le genre de film qui supporte allègrement une seconde vision tant, en évitant les pièges conduisant du classicisme à l’académisme poussiéreux, Tom Hooper y déploie un regard fidèle mais néanmoins aiguisé sur l’Histoire.

JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS

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