« Labrador bleu »

Distribué par Papa Shango/Warner.

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Paradoxalement, l’écriture d’Isha tire sa flamboyance de son économie de moyens. Une simple phrase, un détail croqué en deux mots, et une scène entière se déplie. C’est un don précieux que de réussir à nommer si bien les choses. C’est d’ailleurs comme cela que démarre -quel prénom pour l’enfant qui vient de naître?- et s’achève Labrador bleu -la couleur d’un granit choisi pour la pierre tombale du défunt… Pour son premier album « officiel », le rappeur bruxellois a ainsi décidé d’inscrire ses morceaux dans un parcours de vie. Une trajectoire, qu’il raccroche en outre aux quatre éléments, évoqués par des bruitages -le vent pour le souffle de vie, le feu du péché, l’eau de la rédemption, et la terre à laquelle chacun est appelé à retourner.

Voilà pour le cadre quasi shakespearien de Labrador bleu. Une fois posé, il permet à Isha de balancer sa poésie de zonard. À fleur de bitume, elle est particulièrement sombre, voire désenchantée. La vie augmente? Vraiment? Dans la ville du « Tueur de dragons », on a plutôt l’impression que, plus que jamais, la mort rôde partout. Limitant les invitations aux proches (Limsa, Caballero & JeanJass, OG Gold), Isha raconte la rue et ses vices (À plat ventre), ses trahisons et ses règlements de compte (Étage). Ici, la sonnerie de récréation est prolongée par celle de la prison, et les rares « mots doux » riment avec les modous, terme désignant les vendeurs de crack dans le métro parisien. Dans l’un des morceaux les plus apaisés (intitulé… Balle dans la tête), Isha rappe: « Je rêve d’une clé qui ouvre toutes les portes/Et d’une épée qui coupe toutes les cordes. » L’espoir malgré tout…

L.H.

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